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Pêche à la crevette : les temps sont durs dans les zones de l’Estuaire et de Sept-Îles

Les temps sont durs pour les pêcheurs et les transformateurs de crevettes. Après avoir connu un début de saison assombri par le mauvais temps, ils subissent les répercussions d’une diminution des quotas de 60 % et de 74 % dans les zones respectives de Sept-Îles et de l’Estuaire. À ces conséquences désastreuses s’ajoute la rareté de la ressource.

Le début de la pêche a été difficile. «On a eu un printemps plus dur parce qu’il n’a pas fait beau, estime le crevettier Roberto Desbois. Au mois d’avril, il a venté et il n’a pas fait chaud. Un moment donné, on avait des tempêtes à tous les deux à trois jours. On pêchait quand même, mais on a perdu à peu près quatre jours à cause du mauvais temps. Nous, ça marche par commandes. Si tu restes au quai, tu la perds. Tu ne peux pas la reprendre.»

RARETÉ DE LA RESSOURCE

Selon le capitaine du YOHAN MIRJA, la crevette n’est pas au rendez-vous. «Ça va moyennement, indique le marin qui, la veille de notre entretien, avait perdu six heures de pêche à cause d’un bris de son chalutier. Elle est pas mal rare. Les bateaux ne ramassent pas grand-chose. C’est assez tranquille.»

À son avis, la zone de Sept-Îles est la seule, pour l’instant, où il y a un peu de crevettes. «Il y en a qui sont allés à la Pointe-aux-Anglais, du côté sud et du côté ouest de l’île d’Anticosti et ils n’ont rien ramassé, raconte M. Desbois. S’il y a un petit peu de crevettes, les bateaux s’appellent, on se ramasse tous à la même place et la crevette ne dure pas longtemps. Il y a trop de bateaux pour la quantité de crevettes qu’il y a.»

DIMINUTION DE QUOTA

«J’ai perdu presque tout mon quota dans l’Estuaire, déplore le pêcheur. Dans Sept-Îles, j’ai perdu 60%. On va avoir un avenir assez difficile. Il reste l’île d’Anticosti. Je ne sais pas s’il va y avoir une ration. S’il n’y a pas de crevettes à Anticosti, ça va regarder drôle!»

À son seizième voyage, il en avait capturé un total de 130 000 livres à ce jour. «L’an passé, c’était à peu près semblable, mais c’était un peu mieux, compare le capitaine du YOHAN MIRJA, qui travaille depuis 37 ans pour Les Pêcheries Raymond Desbois. Avant, on prenait 1,3 ou 1,4 million de livres. Mais là, cette année, on a juste 600 000 à prendre. J’ai déjà eu jusqu’à 1,7 million de quota.»

Avec quatre hommes de pont, il pêche la perle rose du Saint-Laurent et la cuit sur le bateau. Le petit crustacé est vendu frais en écale directement dans les poissonneries de Québec, qui sont la propriété de son employeur. «Je ne peux pas me comparer avec les autres, précise l’homme originaire de Sainte-Thérèse-de-Gaspé, dont le port d’attache est Matane. Je ne fais pas la même pêche que les autres bateaux. Je ne peux pas pêcher à la même place que les autres parce que moi, il faut que je ramasse la grosse crevette. Les autres peuvent en prendre un peu plus. Moi, je ne pêche pas pour la quantité, je pêche pour la qualité. On a un meilleur prix, vu qu’on la vend cuite.»

MARCHÉ SATISFAISANT

Depuis l’ouverture de la pêche, il a au moins l’assurance que le marché soit bon. «La crevette cuite commence au mois d’avril et c’est fort, se réjouit le pêcheur. Mais, plus ça avance dans la saison et quand le homard arrive sur le marché, la crevette tombe.»

La saison de pêche de Roberto Desbois commence tôt et se termine tard. Après sa saison pour le marché de la crevette cuite qui prend fin vers le 12 mai, il continue la pêche à la crevette, dont les débarquements sont destinés à l’usine Les Fruits de mer de l’Est du Québec de Matane. À la fin octobre ou au début novembre, il reprendra la pêche pour le marché de la crevette cuite. «À l’automne, on n’en fait pas beaucoup, dit-il. On en fait pour certains clients.»

DÉBUT DE SAISON ARDU

Raoul Chouinard pêche la crevette dans les mêmes zones. Actuellement, c’est son fils de 37 ans, Nicolas, qui est à la barre de son bateau dans la zone de Sept-Îles. Le paternel prendra le relais à la fin mai. «Lui a ses quotas et moi, j’ai les miens», précise-t-il.

Raoul Chouinard confirme lui aussi que la météo a nui au début de la saison. «Ils ont dû rentrer à cause du mauvais temps, raconte-t-il. Ils ont été 24 heures sans pouvoir sortir. Il faisait trop froid.»

M. Chouinard ne peut cacher son inquiétude. «Cette année, ce n’est pas bon», se désole-t-il. Après trois voyages, l’équipage avait fait des récoltes respectives de 25 000, de 17 000 et de 11 000 livres. «On a à peu près 65 000 livres de prises, indique le capitaine. On a 340 000 livres de quota.» L’an dernier, aux mêmes dates, ils avaient pêché respectivement 45 000, 50 000 et 65 000 livres de crevettes.

PRIX TROP BAS

Raoul Chouinard est le seul crevettier qui approvisionne l’usine Les Crustacés des Monts de Sainte-Anne-des-Monts. L’homme dénonce le prix qu’il reçoit au débarquement. Le prix varie de 1,25$ à 1,36$ la livre. «Le prix n’est pas bon, déplore le capitaine propriétaire depuis 36 ans. Le fuel est à 95 cents du litre. Ce n’est pas rentable! Les prix ne montent pas. En 1985, on avait 85 cents la livre et c’est monté à 1$ la livre. Depuis les années 90, toutes les autres espèces ont augmenté de quatre à six fois. Le fuel était à 25 cents le litre. La crevette, elle, n’augmente pas. C’est aux usines à monter le prix.»

«Elle se vend presque 10$ la livre à l’épicerie, pas décortiquée, poursuit-il. Quand tu te prends moins de salaire que tes hommes de pont, c’est impossible de pouvoir continuer comme ça. On n’arrive pas! Avec le coût du bateau et les réparations, on ne peut pas tout payer. On s’endette pour essayer de se rentabiliser. Si les usines maintiennent un prix bas comme ça, ça ne pourra pas continuer!»

Le capitaine Raoul Chouinard estime que la morosité entourant la pêche et la transformation de la crevette est vraiment décourageante. «Il y a deux pêcheurs qui partent pour un qui reste, estime-t-il. Si j’avais su que j’allais vivre ce que je vis là, j’aurais fait autre chose.»

TRANSFORMATION AU RALENTI

Bertrand Langlois des Crustacés des Monts, de Sainte-Anne-des-Monts, affirme pourtant offrir 10 cents de plus que les autres usines de transformation. Pour le dirigeant, les affaires ne roulent pas comme il le souhaiterait. «Ça ne va pas vite avec une baisse moyenne du quota de 40% et un seul bateau, soupire-t-il. Je ne sais pas ce qui se passe.»

M. Langlois craint de perdre sa quarantaine d’employés, faute de pouvoir leur offrir un nombre de semaines de travail satisfaisant. «Les travailleurs vont aller voir ailleurs», appréhende-t-il.

SOLUTION OU MIRACLE

Même si l’entrepreneur souligne qu’il devra trouver une solution, il ne peut s’empêcher de croire que «ça va prendre un miracle». Il se console au moins en se disant qu’il n’est pas le seul dans une situation si peu enviable. «Au Québec, ce n’est pas évident dans les autres usines non plus, croit Bertrand Langlois. Même celles qui ont quatre ou cinq bateaux, ce n’est pas comme ça que tu peux faire virer une usine et faire travailler ton monde!»

UNE ANNÉE DIFFICILE

Une dizaine de crevettiers débarquent leurs chargements aux Fruits de mer de l’Est du Québec à Matane. Mais, la situation n’est guère mieux. La présidente du syndicat confirme la rareté de l’espèce. Depuis le redémarrage de la chaîne de production, au début avril, une moyenne de 45 000 livres de crevettes par jour est transformée.

«Des fois, on a fait 60 000 livres, indique Micheline D’Astous. Mais, ce n’est pas à tous les jours. On est tout le temps sur rappel. La plus grosse semaine qu’on a faite, c’est la semaine après Pâques. On a fait 45 heures. À venir jusqu’à date, les semaines de cinq jours ont été rares. On fait une trentaine d’heures par semaine.» La dame est bien loin des belles années où elle se souvient qu’il y avait trois quarts de travail dans l’usine, qui embauchait quelque 200 employés.

De plus, la diminution des quotas a des répercussions sur le nombre d’heures de travail. Micheline D’Astous ne sait même pas si la trentaine d’employés cumuleront suffisamment d’heures de travail pour pouvoir se qualifier à l’assurance-emploi. «On a connu de meilleures années que ça, se remémore la représentante des travailleurs qui compte 40 ans d’expérience au sein de l’entreprise. C’est une année difficile et le monde est pas mal sur les nerfs. Ils ont moins envie de rire et ils se posent des questions. Mais, ils gardent un moral pas pire. Ils pensent à ce qu’ils pourront faire pour avoir de l’assurance-emploi. Ce n’est pas facile. C’est une situation assez triste pour les pauvres travailleurs. Il va falloir aller chercher de l’aide du gouvernement.»

Pour éviter le fameux «trou noir», soit la période où des employés se retrouvent sans prestations d’assurance-emploi, la direction et le syndicat de l’entreprise ont fait des démarches auprès d’Emploi-Québec afin de trouver un ou des programmes d’aide pour les travailleurs.

PLUS DE TECHNOLOGIE, MOINS DE TRAVAILLEURS

Mme D’Astous estime que le manque de travail n’est pas uniquement attribuable à l’effondrement des stocks. L’automatisation y contribue également. «La technologie s’améliore tout le temps, souligne-t-elle. C’est moins long à faire que dans le temps où tout était fait à la main. Ils améliorent tout le temps les machines pour que les choses aillent plus vite. Ça fait perdre des heures et des jobs.» La travailleuse a connu des quarts de travail de douze heures. Cette année, l’ouvrage se fait la plupart du temps en cinq heures.

Cette situation n’a rien pour encourager la relève dans l’usine, où la main-d’oeuvre est vieillissante. «Il y avait quelques jeunes qui étaient entrés, raconte la porte-parole des syndiqués. Mais, ils ne travaillaient pas assez. Quand tu n’as pas d’heures, tu vas ailleurs!»

NOUVELLE LIGNE DE TRANSFORMATION DU CRABE

Pour tenter de compenser le nombre de semaines de travail perdu dans la transformation de la crevette, l’usine de Matane a mis en opération une ligne de transformation du crabe. Mais, la ressource n’est pas abondante non plus. La technologie étant plus évoluée, le crabe est lui aussi transformé plus rapidement.

«Ça ajoute une journée de temps en temps, se console Micheline D’Astous. Mais, jusqu’à date, ça n’a pas donné vraiment beaucoup de journées. Ceux qui ne font rien que le crabe, ce n’est pas ça qui va leur permettre de se qualifier à l’assurance-emploi.» Elle croit aussi qu’il faut laisser le temps nécessaire à l’entreprise matanaise de se faire un nom dans la transformation du crabe avant que le marché ne se développe.

GASPÉ-NORD – page 2 – Volume 31,2 – Avril-Mai 2018

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