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Homard gaspésien : un atelier de travail intense à venir malgré l’annulation du comité consultatif

Le comité consultatif sur le homard en Gaspésie a été annulé cette année par le ministère fédéral des Pêches et des Océans, mais la tenue d’un simple atelier de travail le 23 mars devrait néanmoins permettre d’aborder certains enjeux risquant ou courant la chance d’avoir un effet important à moyen terme sur les 158 détenteurs de permis de la péninsule.

L’annulation du comité consultatif découle de l’arrêt de travail du biologiste spécialisé dans le stock de homard de la Gaspésie et devant présenter les derniers résultats scientifiques, précise O’Neil Cloutier, directeur du Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie.

Alors qu’aucun changement n’est prévu dans les mesures de gestion au cours de la saison de pêche 2022, les éléments de discussion porteront notamment sur l’application de diverses mesures touchant la gestion des interactions avec les mammifères marins, le Plan de pêche axé sur la conservation et l’amélioration de l’habitant de certains secteurs de pêche.

«Il y aura évidemment des discussions sur les obligations imposées par le Marine Mammal Protection Act des États-Unis. L’entrée en vigueur des mesures de protection des mammifères marins est prévue pour 2023. Il reste encore énormément de travail à faire pour trouver des engins de pêche convenables», aborde M. Cloutier.

INCOHÉRENCE OBSERVÉE

«En Gaspésie, on est les seuls au Québec à avoir fait des tests sur une nouvelle technologie, la gaine. Quand elle est soumise à une tension de 1 700 livres, le câble se rupture. C’est comme un bas de nylon dans lequel on insère le câble. Il y a aussi un équipement pas approuvé par les Américains, appelé «tough rope», fait en Inde. Nous, on l’avait acheté pour 23 000 $. On a appris le 23 décembre qu’il n’était pas accepté par les Américains. Ça nous fait dire qu’il y a encore beaucoup d’incohérence entre les deux gouvernements, celui du Canada et celui des États-Unis. On a demandé au ministère des Pêches et des Océans (MPO) de se rapprocher très étroitement de ce qui est exigé par les Américains», explique-t-il.

Le Marine Mammals Protection Act fait planer la menace d’un boycottage des produits marins canadiens si un ensemble de mesures de protection des mammifères, pas seulement la baleine noire, n’est pas appliqué rigoureusement. Ces mesures sont essentiellement déterminées par les autorités américaines en la matière, mais elles sont quand même discutées avec Pêches et Océans Canada.

O’Neil Cloutier trouve toutefois que le ministère fédéral ne tient pas son bout dans ce domaine.

«Le Canada a décidé de joindre le Marine Mammals Protection Act. Les Américains veulent démontrer que les baleines peuvent se désempêtrer des cordages et mouillages des pêcheurs. Oui, il y a effectivement une menace de boycott des produits marins canadiens sur le marché américain, mais lors d’une réunion, le 20 janvier, les représentants des Îles-de-la-Madeleine, de la Gaspésie et de la Côte-Nord ont répété ce qu’on dit depuis le début: dans ses négociations, le gouvernement du Canada n’a pas défendu les particularités régionales de la pêcherie des fonds marins de nos secteurs», précise-t-il.

«Dans le Maine, le homard est exploité sur des fonds plats. Ici, en Gaspésie, on pêche sur des fonds rocheux et très escarpés. Si on perd des casiers (en raison de la rupture des câbles soumis à une tension supérieure à 1 700 livres), ça crée une mesure qui cause un désastre environnemental parce que ces casiers continuent à pêcher. Ils seront très difficiles à récupérer ici. On pêche aussi à 10 minutes du quai. Depuis cinq ans, il y a trois équipes qui vont sur l’eau et qui surveillent les corridors de circulation des baleines noires, Pêches et Océans Canada, la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) et Transport Canada. En cinq ans, on n’a jamais démontré qu’une baleine noire s’est empêtrée dans un mouillage de casiers à homard. En 2017, une baleine noire a été observée à 18 kilomètres de la côte sud de la Gaspésie alors qu’on pêche à un demi-kilomètre de la côte. Trois semaines de pêche ont été perdues et on a aussi perdu 9 millions $ en retombées économiques, quand on compte les prises perdues et les services connexes comme la transformation», souligne O’Neil Cloutier.

En 2018, les pêcheurs gaspésiens ont réussi à délimiter des secteurs afin que l’observation hypothétique d’une baleine noire ne mène pas à une fermeture complète de la pêche jusqu’au littoral. Aucun de ces secteurs n’a été fréquenté par une baleine noire.

POURQUOI ÊTRE SI PRESSÉ?

«Ce qu’on dit, c’est que nous ne sommes pas si pressés; prenons le temps de faire des affaires comme il faut. Jusqu’à maintenant, seulement les Gaspésiens ont fait des essais avec des engins facilitant le dégagement des baleines. Avec la gaine, il y a un problème avec des fonds escarpés. Peut-on essayer d’autres outils, calmement? Nous ne sommes pas dans le corridor des baleines noires. Ça nous désar- çonne, ça nous horripile de voir les mesures pas adaptées à notre réalité. Ce sont les agents locaux du MPO qui vont manger les coups si des engins qui ne fonctionnent pas sont imposés. Ce n’est pas acceptable», insiste O’Neil Cloutier.

«L’autre affaire qui démontre que cette opération est précipitée: la loi s’applique aux États-Unis, mais aucun distributeur d’équipement n’est prêt à fournir les engins de pêche adaptés aux nouvelles normes. La gouverneure du Maine a demandé au gouvernement de surseoir à l’entrée en vigueur de la loi. Les fournisseurs ne veulent pas prendre la chance de ne pas vendre les engins et de rester pris avec ces équipements», souligne-t-il.

O’Neil Cloutier note qu’un second dispositif devrait être testé par les homardiers gaspésiens en 2022.

«C’est un maillon en plastique. Si on l’a, ce sera juste avant la saison de pêche. Il est accepté par les Américains. On n’aura pas beaucoup de temps pour faire l’adaptation. Le nombre de lignes de casiers à l’essai passerait de 6 à 12. Un homardier pêche avec 39 lignes de 6 casiers. Passer de 6 à 12 lignes de casiers à l’essai nous amène proche de 30 % de notre capacité de pêche. Ça nous fait deux équipements qui permettent de rompre à   1 700 livres. On aura au moins un choix. Si on avait plus de temps, on pourrait en essayer d’autres. Ces équipements viennent directement des États-Unis. Quand le choix aura été fait, les fournisseurs locaux pourront en acheter et les vendre», explique M. Cloutier.

ÉCHANTILLONAGE POST-SAISON

Deux enjeux scientifiques seront portés à l’ordre du jour de l’atelier de travail du 23 mars avec Pêches et Océans Canada. Il s’agit de l’échantillonnage post-saison réalisé par le Regroupement des pêcheurs   professionnels du sud de la Gaspésie le long des côtes fréquentées par ses membres, de même que la possibilité d’obtenir un appui financier pour l’installation de   récifs artificiels additionnels.

«Les pêcheurs sont très intéressés à ces résultats. Ce sera notre dixième année d’échantillonnage en 2022. Il n’y a pas d’autre échantillonnage post-saison réalisé de façon autonome (par les pêcheurs, dans ce cas sous supervision du biologiste du Regroupement, Jean Côté). Aux Îles-de-la-Madeleine, ça se fait depuis au moins 30 ans sous la supervision du MPO. Ils ont toujours un avis scientifique. Aux Îles, ils utilisent un chalut, qu’on appelle une queue de rat, un petit chalut, déposé sur le sable. Ici, en Gaspésie, notre fond est beaucoup plus escarpé. Le MPO dit qu’il n’a pas l’équipement pour faire cet échantillonnage scientifique en Gaspésie. Ils ont essayé il y a quelques années et ils ont brisé leur équipement. Je pense qu’il y aurait moyen de trouver une solution», analyse M. Cloutier.

RÉCIFS ARTIFICIELS

Il est très enthousiaste à propos du second point, l’installation de récifs artificiels pour favoriser la rétention du homard.

«C’est un projet déposé au Fonds des pêches du Québec. Les sciences auraient fait une recommandation négative. On va en discuter de nouveau. Nous avons installé des récifs artificiels dans un milieu inapte, non réceptif au homard. Deux ans après, on voit la merveille des récifs artificiels. Ce récif s’est colonisé. Il y a plein d’algues, plein de homards aussi. On a des images vidéo avant et après. Pourquoi installer ces récifs? Pour essayer d’équilibrer les captures entre les zones. Certaines zones sont très prolifiques parce qu’elles sont très escarpées. Notre projet vise le secteur allant de Newport à Bonaventure-Ouest, dans la sous-zone 21A. Donc, le projet a été refusé au Fonds des pêches. Il a été mis de côté temporairement par le Regroupement parce que c’est énormément de travail. Nous, on voit les résultats positifs de récifs artificiels parce qu’on en a une quarantaine déjà installés depuis des années. Ils ont été financés par diverses mesures de compensation, quand un habitat est perturbé par du sable de creusage dans les havres, quand le port a été aménagé à la cimenterie de Port-Daniel, ou quand on a apporté des améliorations du littoral à Percé. C’est de là que viennent les résultats. On veut les présenter à la table de travail. Un autre fonds du MPO pourrait être utilisé pour financer de nouveaux récifs», explique M. Cloutier.

Un enjeu administratif occupe un point de l’ordre du jour et il sera réglé avec rapidité s’il n’en tient qu’au directeur du Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, l’inclusion dans le Plan de pêche axé sur la conservation, le PPAC, de la pêche du homard l’automne des Mi’gmaqs de Listuguj.

«Pêches et Océans Canada propose une modification pour inclure la pêche d’automne dans l’un de nos secteurs (zone 21b). C’est une pêche d’automne où il y a une pêche printanière. On a indiqué qu’on ne participait plus à la modification du PPAC. C’est une bible pour nous. On a travaillé pendant deux ans sur ça en 2014 et 2015 et là, dans un élan de pratique différente, le MPO a donné son accord sur la pêche d’automne. Il n’est pas question qu’on approuve l’inclusion de la pêche d’automne dans le PPAC», tranche M. Cloutier.

À un peu moins de deux mois de l’ouverture présumée de la pêche en Gaspésie, il demeure prudent au sujet du prix que pourraient toucher les homardiers. En 2021, les pêcheurs ont reçu environ 8,50 $ la livre pour leur crustacé et le prix pourrait être aussi élevé en 2022.

«Les prix sont très élevés en Nouvelle-Écosse depuis janvier, mais l’hiver est très dur. Le prix est élevé parce qu’il n’y a pas beaucoup de homard capturé. Les industriels nous disent que les marchés sont vides. La guerre entre la Russie et l’Ukraine peut influencer ces prix. Si ça s’étend un peu plus, ce serait tout à fait différent comme contexte», conclut O’Neil Cloutier, rappelant que certaines années, le prix a chuté sérieusement entre la fin février et la fin avril.

LA GASPÉSIE – pages 8-9 – Volume 35,1 Février-Mars 2022

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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