dimanche, novembre 3, 2024
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Autre record des débarquements de homard fracassé

Les captures de homard des Îles-de-la-Madeleine frisent les 10,5 millions de livres cette année, contre près de 9,3 millions en 2017. Ce nouveau record représente une hausse de 13 % par rapport à la saison précédente. Quant au prix moyen provisoire payé à quai, il s’établit à 6,33 $ la livre, contre une moyenne finale de 6,90 $ versée l’an dernier. Il s’agit d’une baisse de 8 %. Malgré tout, la valeur des achats des six acheteurs inscrits au plan conjoint est elle-même en hausse de 3,5 millions $, pour dépasser les 67,6 millions $.

UNE SAISON VENTEUSE

«Ça a été une très bonne année pour tout le monde, résume Brenton Clarke, capitaine du CLARKE’S PRIDE de l’Île d’Entrée, dont les prises sont en hausse du quart par rapport à la saison 2017. Mais, côté température, ça a été une des plus venteuses et des plus froides que j’aie vues en 46 ans de carrière.»

Laurent Bénard de Pointe-aux-Loups raconte avoir manqué cinq jours de pêche à cause du vent, justement. Or, bien que ses prises aient augmenté d’environ 10 % cette saison, il déplore que Pêches et Océans Canada n’ait pas collaboré pour permettre aux pêcheurs de profiter de leur dernière journée de pêche, qui avait été repoussée au lundi 9 juillet lorsque la mise à l’eau a été décalée d’une journée, parce qu’il ventait trop. «Bien que normalement on ne pêche pas le dimanche, on a demandé à plusieurs reprises une autorisation spéciale pour le 8 juillet, pour profiter d’une fenêtre de beau temps, parce qu’on annonçait des rafales allant jusqu’à 80 km/h pour le lendemain, explique le capitaine de L’ARYANIK. Mais le ministère n’a pas collaboré parce que c’était hors protocole. Et pourtant, on ne voulait pas pêcher ou appâter; c’était juste pour aller retirer les casiers de l’eau.» M. Bénard, comme bon nombre de ses collègues a donc dû y aller de prudence et terminer sa saison deux jours avant son échéance. Lui qui siège sur le comité consultatif de gestion de la pêcherie se promet d’ailleurs de ramener le sujet à la discussion. «Ça ne sera pas long», dit-il.

«C’était très stressant de gérer la fin de la saison, renchérit Marc Landry de L’Étang-du-Nord, qui a réussi à pêcher le dernier lundi malgré tout. J’avais des cages à l’eau depuis trois jours et ça aurait été une perte de plus de 1 000 livres si je n’avais pas pu sortir», dit-il. Globalement, ce capitaine du MARIBELLE enregistre une hausse de rendement de 3 000 livres, par rapport à son bilan 2017.

«Heureusement que le homard a continué à «cager» malgré tout ce vent, commente pour sa part le capitaine du BAY CATCHER de la Pointe-Basse, Charles Poirier. C’est parce qu’on n’a pas eu de vent dominant de l’Est; si on a deux jours de vents dominants de l’Est, on a trois jours qui ne pêchent pas. Mais, cette année, le vent changeait continuellement de direction d’une journée à l’autre. Pour les hommes d’équipage, c’est plus dur physiquement, mais ça n’a pas affecté le homard.»

BONS INDICES D’ABONDANCE

De son côté, Hugo Bourgeois de Millerand n’a manqué aucune journée de pêche cette saison. Il rapporte une hausse de 15 % de ses captures, pour un bilan de plus de 30 000 livres pour une deuxième année consécutive. Ironiquement, tandis qu’il pêche au Nord, ce propriétaire du MARIE-HUGO compte parmi ceux qui rechignaient à prendre la mer dès le début mai, parce que l’eau était encore très froide. «À chaque début de saison, on est toujours stressés, dit-il; c’est un éternel recommencement. On a tout le temps de la misère à accepter la date du départ, mais un coup partis, on est pas arrêtables!»

Jean-Eudes Lapierre de Cap-aux-Meules constate à ce propos que de plus en plus de pêcheurs madelinots capturent plus de 30 000 livres de crustacés en une saison, alors qu’il y a 10-15 ans, la norme variait entre  15 000 et 20 000 livres. «Le homard a augmenté partout, cette année, dit-il;  c’était dur à comprendre. Dans le passé, on avait une petite pointe d’abondance à terre, en fin de saison, explique le capitaine du          JEAN-LÉON. Mais sur la fin, cette année, c’était aussi bon au large comme à terre.»

Quant à Lauréat Déraspe de Grande-Entrée, il attribue la hausse globale des captures aux nombreuses mesures de protection du homard qu’ont adoptées les 325 pêcheurs de la flottille des Îles, au fil des ans.   «Et ça regarde bien pour l’avenir, affirme le capitaine du SIMON-JACQUES II. Nous avons vu beaucoup de femelles remplies d’œufs et de petits. En fin de saison, j’avais une moyenne de 20-25 raveuses par ligne, et tellement de petits à remettre à l’eau, que ça faisait frémir! Juste la dernière journée, sur 604 livres (livrées à quai) j’en ai rejeté plus que j’en ai sauvé.»

RENTABILITÉ VARIABLE

Quoi qu’il en soit, la rentabilité de la saison 2018 ne se traduit pas nécessairement de façon égale pour tous. C’est ainsi que Marie-Hélène Cormier de Havre-Aubert  calcule que sa petite hausse d’environ 2 % de ses captures par rapport à l’an dernier, ne compense pas la baisse du prix de 8 %. «Ce sera un peu moins rentable cette année, à moins d’un ajustement, dit-elle. C’est vrai qu’on n’a jamais eu un prix aussi haut que celui de ces deux dernières années, concède la capitaine du SHELL HUNTER. On est bien contents de ça et on espère que ça va se maintenir dans ces eaux-là; c’est ce qu’on souhaite. Mais c’est comme dans n’importe quoi; on veut toujours avoir en avoir plus.»

Son confrère Steve Turnbull de Grosse-Île admet qu’il est, lui aussi, un peu déçu du prix reçu cette année. «On nous explique la baisse du fait qu’il y avait beaucoup de homard sur le marché, relève-t-il. Mais c’est dur à comprendre parce qu’il y avait beaucoup de zones fermées (à cause des baleines) en fin de saison, tandis que l’an passé, les dernières semaines, on avait encore de meilleurs prix. Et le coût de la vie augmente à chaque année, souligne le capitaine du SUNSET COVE. Le fuel était plus cher cette année; tout est plus cher à chaque année.»

LES ÎLES-DE-LA-MADELEINE – page 12 – Volume 31,4 – Septembre-Octobre-Novembre 2018

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Hélène Fauteux
Hélène Fauteux est diplômée en communications et journalisme de l'Université Concordia. Établie aux Îles-de-la-Madeleine depuis 1986, elle a développé une solide expertise en matière de pêche et de mariculture.
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