La saison de capture du hareng dit d’automne s’est déroulée rondement, entre le 17 août et le 10 septembre. Le quota a été pris rapidement et les pêcheurs en ont eu pour leur argent, notamment parce que le prix s’est établi à 60 cents la livre après quelques jours, un record.
Roch Lelièvre, président de l’entreprise Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, le principal acheteur de hareng en Gaspésie, a été surpris par le rythme des prises.
«Les pêcheurs ont pris le quota en trois semaines. Ça fait plusieurs années qu’ils n’avaient pas pris le quota total. J’avais huit pêcheurs, quatre de la Gaspésie et quatre du Nouveau-Brunswick. Sur trois semaines, il y a une seule journée où on n’a pas eu de hareng. On a reçu 160 000 livres de hareng à notre plus grosse journée. Autrement, c’était de 80 000 à 90 000 livres», explique M. Lelièvre.
Son usine, située à Sainte-Thérèse-de-Gaspé, a reçu 1,1 million de livres de hareng, comparativement à 440 000 l’an passé, pour le même nombre de bateaux, mais en l’absence d’atteinte de quota. La pêche avait été arrêtée après six semaines.
Roch Lelièvre voit dans le rythme des captures un signe d’espoir à l’effet que le stock pourrait être en reconstitution. Le quota global du sud du golfe du Saint-Laurent, aussi désigné sous le nom de zone 16B, avait été fixé à un seuil prudent de 2 982,5 tonnes métriques.
«C’est encore loin des années de 2 millions ou 2,5 millions de livres à l’usine. J’ai remarqué que le hareng était plus beau, plus gros; il faisait penser au hareng des bonnes années», souligne Roch Lelièvre.
L’incertitude quant au rythme des captures avant la saison l’a incité à décider de ne pas ouvrir les Fumoirs Gaspé Cured cet automne, également propriété de la firme Poisson Salé Gaspésien, de Grande-Rivière.
«Au début de la saison, le poisson est toujours dans l’eau. Les prises nous ont surpris, mais ça n’aurait pas été assez pour ouvrir les fumoirs», précise Roch Lelièvre.
Il y a maintenant quatre ans que les fumoirs n’ont pas été démarrés. Il note que le contexte est «plus positif» qu’au cours des dernières années. «À 2 millions de livres, on commence à regarder pour rouvrir les fumoirs», dit-il.
L’usine de Sainte-Thérèse-de-Gaspé a assigné dix personnes à la réception du hareng «parce qu’on ne faisait que le congeler», note M. Lelièvre. La transformation de homard du Nouveau-Brunswick mobilise toutefois 200 personnes cet automne dans cette usine.
Un ajustement de prix pendant la saison
Les pêcheurs de hareng de la Gaspésie ont reçu 50 cents la livre pour le hareng en début de saison, un prix qui a été assez rapidement haussé à 60 cents. «La compétition, l’offre et la demande expliquent ça», souligne Roch Lelièvre à propos d’un seuil record.
Le fait que la presque totalité des 1,1 million de livres de hareng soit dirigée vers la congélation en prévision de la saison 2026 de pêche aux crustacés présente un certain avantage, avance-t-il.
«On s’est fait un bon inventaire dans le hareng. Il faut dire qu’une grosse partie des homardiers prend du maquereau, mais d’autres pêcheurs s’en font congeler. Le hareng est beaucoup utilisé dans le crabe. Le prix du maquereau a été très cher, cette année. Il est encore sous moratoire ici, il faut donc l’importer. C’est difficile de prédire le prix du maquereau importé d’une année à l’autre. C’est parfois plus de trois ou quatre fois le prix de nos appâts, mais ça varie. Des pêcheurs se tournent vers autre chose, comme le sébaste», explique Roch Lelièvre.
Un faible pourcentage du hareng capturé récemment servira à la consommation humaine. «On en a transformé un peu pour faire du (hareng) salé, pour le marché local, québécois et du Nouveau-Brunswick», conclut-il.
Une capture accélérée
Le homardier Samuel Lepage a pêché le hareng de la mi-août au début de septembre comme aide-pêcheur de Pierre-Olivier Lemoignan, également homardier. Leur hareng a été livré chez Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan.
«On a fait un record, de 253 000 livres en 15 sorties», résume Samuel Lepage. Il note que la deuxième semaine a été particulièrement fructueuse.
«Durant la deuxième semaine, on a fait quatre quotas et 10 000 livres le cinquième» dit-il. Un quota est la quantité maximale de prises en une nuit, soit 22 000 livres.
Après un léger ralentissement lors du début de la semaine suivante, les prises ont été abondantes lors des derniers jours, à tel point que le ministère fédéral des Pêches et des Océans a annulé la dernière nuit de capture, parce qu’au rythme établi précédemment, le quota aurait été défoncé, étant donné qu’il ne restait que 1 ou 2 % à capturer, précise Samuel Lepage.
Le secteur de Miscou a été clairement le plus productif cette année. L’équipage composé par Pierre-Olivier Lemoignan, Samuel Lepage et Michaël Rail s’est même abstenu de pêcher dans le secteur de Cap d’Espoir, hautement considéré pendant longtemps pour le hareng, mais plus imprévisible depuis quelques années.
«Cette année, on a pêché deux nuits seulement à Chandler et le reste à Miscou (…) Le stock est revenu. Ça fait trois années qu’on gratte. On a pris 100 000 à 110 000 livres pendant six semaines l’an passé», rappelle Samuel Lepage.
«Tout le monde a été surpris cette année (…) On a vu du gros hareng et il était chargé de rave. Les usines ont perdu de l’argent», remarque-t-il, en faisant référence au fait qu’il ne s’est pas produit de rave dans quelques usines adjacentes à la zone 16B avant tard dans la saison.
Samuel Lepage note aussi que les captures de hareng auraient été meilleures si le feu vert avait été plus précoce. «Plus il est tôt dans la saison, plus il y en a», assure-t-il.
LES PÉLAGIQUES – page 2 – Volume 38,3 Septembre-Octobre 2025

























