mardi, novembre 18, 2025
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Les producteurs d’huîtres du Québec maritime soulagés par la dernière décision de l’ACIA

«Il était minuit moins une!», nous a déclaré l’ostréiculteur Christian Vigneau, dirigeant de la ferme maricole Cultures du Large de Havre-aux-Maisons, lorsqu’il a enfin reçu le feu vert de reprendre ses approvisionnements en huîtres juvéniles des Maritimes, plus tôt cet été. «On puisait à chaque semaine dans nos réserves, ça fait qu’il fallait que les permis de transfert reviennent si on voulait continuer à produire. Sinon, c’était l’arrêt assuré de l’entreprise.»

Tout comme la majorité de ses confrères de la Gaspésie et des Îles, ce plus important producteur d’huître québécoise avait vu sa source de matière première se tarir en juillet 2024, en raison de la présence des maladies à déclaration obligatoire MSX et perkinose – aussi connue en tant que Dermo – dans certains stocks des provinces voisines. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) avait alors interdit les déplacements des mollusques des zones affectées vers les eaux québécoises exemptes, ce qui menaçait carrément les principaux joueurs de l’industrie de faillite (Pêche Impact, mai 2025).

Or puisque ces maladies n’affectant que les huîtres – mais ne posant aucun risque pour la santé humaine ni pour la salubrité des aliments – ont finalement été décelées dans les élevages de l’entreprise Les HuÎtres William B. de la Baie des Chaleurs, le 4 juillet dernier, l’ACIA a conclu qu’elles sont probablement déjà présentes dans la plupart des eaux marines du Québec depuis un certain temps, étant donné l’ampleur des approvisionnements québécois en provenance des Maritimes. En date du 2 septembre, l’agence a jusqu’à décrété que toutes les provinces et les eaux du Canada atlantique sont contaminées ou sont susceptibles de l’être. «L’éradication est impossible», a-t-elle expliqué lors d’une réunion préalable avec l’industrie, tenue le jeudi 28 août.

Soulagement

La décision de l’ACIA simplifie les exigences pour les ostréiculteurs de l’Est canadien, puisqu’ils n’ont plus à lui demander de permis de transfert d’une région à une autre étant donné qu’ils se font désormais à l’intérieur d’une zone déclarée ayant le même statut sanitaire. Il n’en demeure pas moins que Pêches et Océans Canada continue d’assurer la gestion de ces déplacements en collaboration avec les autorités provinciales, par l’entremise du Programme de délivrance de permis d’introduction et de transfert. Ainsi les producteurs doivent toujours appliquer certaines règles de prévention, dont le trempage des huîtres importées dans une solution de chaux et de saumure avant leur transfert dans les parcs d’élevage, tel qu’exigé par le ministère québécois de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ).

Carlo Éloquin de Grande-Entrée Aquaculture applaudit évidemment à la tournure des évènements. «C’est un grand soulagement que d’avoir enfin pu reprendre le cours normal de nos opérations, après une année très stressante, confie-t-il. L’idée de fermer les portes après 28 ans  d’exploitation, ça faisait mal au cœur. Ce n’est pas pour l’aspect monétaire qu’on est en affaires. On le fait pour la passion!»

M. Éloquin, qui écoule habituellement 95 % de sa production sur le marché du Québec d’avril au début janvier, avait dû restreindre ses ventes au territoire madelinot afin d’éviter une rupture de stock. Le manque à gagner est important, dit-il. «Le marché local est intéressant, mais il est limité. Et normalement, comme on a de bonnes périodes de ventes à l’automne, on va travailler fort pour essayer d’équilibrer notre année. C’est certain qu’on n’atteindra pas notre objectif d’augmentation annuelle de notre volume de ventes. Si on peut arriver au même niveau de l’année passée, ça va être bien.»

Pour sa part, le gaspésien William Bujold qui en est à sa 10e saison d’opération assure n’avoir enregistré qu’un nombre limité de 4 000 mortalités, lorsque l’ACIA a mis son parc d’élevage en quarantaine au début juillet. Cette perte liée à MSX et Dermo ne représente que 1 % de son volume de vente annuel. «On nous a dit que [ces maladies parasitaires] prennent beaucoup d’années pour pouvoir être détectées et donc, oui, je crains le risque d’une mortalité accrue, admet-il. Mais je reste confiant parce que les taux de mortalité sont quand même marginaux dans les élevages du Nouveau-Brunswick. Et à l’Île-du-Prince-Édouard, où on a trouvé une baie où il y a beaucoup de mortalités, on parle d’huîtres de fond. Tous les élevages qui sont en cages flottantes [comme chez-nous], n’ont presque pas de mortalité.»

Inquiétude

À l’opposé, la ferme madelinienne Les Huîtres Old Harry, est sur un pied d’alerte. Son dirigeant Alexandre Brazeau, craint que les déplacements interprovinciaux de mollusques potentiellement infectés par MSX et Dermo n’affectent ses élevages dont la matière première provient d’une écloserie exempte de contamination. Selon l’ACIA, ces maladies peuvent entraîner une augmentation de la mortalité et une diminution des taux de croissance chez les huîtres. Aussi M. Brazeau voit-il la décision de l’agence d’élargir le statut de zone contaminée à l’ensemble du Canada atlantique, comme une façon de «lancer la patate chaude dans le camp du MPO».

«Ce qui m’inquiète surtout c’est que le Comité d’introduction et de transfert du MPO au Québec nous dise qu’ils font du ‘cas par cas’ plutôt que de se baser sur les mêmes barèmes de prévalence des maladies en place dans les autres provinces, où seuls les transferts des zones à prévalence faible sont autorisés, relève le producteur en opération depuis 2020. Et donc ce qui va se passer, c’est que la contamination va être beaucoup plus fulgurante, et les dommages et mortalités beaucoup plus accrus.»

Par ailleurs, Alexandre Brazeau nous informe qu’il espère débuter la construction d’une écloserie dès le printemps prochain. Par des méthodes de sélection génétique et de croisements pour identifier et élever des individus naturellement plus résistants, une telle infrastructure permettrait notamment de développer à moyen terme une huître québécoise immunisée contre les maladies. Soumis en mai dernier auprès du MAPAQ et du ministère de l’Environnement, de la Lutte aux changements climatiques, de la Faune et des Parcs du Québec, le projet fait toujours l’objet d’analyses en ce qui concerne entre autres les rejets d’eau. «J’attends aussi un changement de zonage de la part de la Municipalité de Grosse-Île et tout porte à croire que ce sera accepté, anticipe l’ostréiculteur. Je garde le cap pour qu’on soit autosuffisant au Québec.»

Quant au cabinet du ministre des Pêcheries québécoises, André Lamontagne, il se limite à dire qu’il est en mode accompagnement dans ce dossier. «La mise en place d’écloseries d’huîtres au Québec pourrait faciliter l’approvisionnement d’huîtres pour notre industrie», convient-il simplement.

MARICULTURE – page 19 – Volume 38,3 Septembre-Octobre 2025

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Hélène Fauteux
Hélène Fauteux est diplômée en communications et journalisme de l'Université Concordia. Établie aux Îles-de-la-Madeleine depuis 1986, elle a développé une solide expertise en matière de pêche et de mariculture.
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