jeudi, avril 25, 2024
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Valorisation des coproduits de la transformation : une filière en développement

Presque un an après le début de ses activités, le consortium de recherche et d’innovation en appui à l’industrie des pêches du Québec poursuit rondement son projet de valorisation des coproduits de la transformation des biomasses marines pour les secteurs bioalimentaires et agroalimentaires. Formé de Merinov, de Cintech Agroalimentaire ainsi que de l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF), le consortium est sur le point de compléter la première étape de son projet qui s’étale sur trois ans.

La première étape consiste à développer des solutions pour stabiliser les ingrédients des coproduits des usines de façon locale, usine par usine. «Ça se déroule bien, fait valoir le chercheur industriel chez Merinov, Laurent Girault. Ça s’est avéré plus facile que ce qu’on appréhendait. On a des procédés qui ne sont pas chers et qui utilisent des équipements qui sont déjà disponibles dans les usines. On va calculer le coût, mais ça apparaît comme étant très raisonnable.»

Actuellement, il s’agit de petites productions pilotes qui seront utilisées par les partenaires du consortium pour le développement de produits.

Les objectifs du projet sont plutôt simples: utiliser les coproduits des entreprises de transformation de crabe et de homard du Québec pour développer des produits alimentaires destinés à des clients dans l’alimentation humaine ou animale. «On veut les sortir le plus possible du compostage pour les réorienter vers des applications à plus haute valeur ajoutée», précise M. Girault.

Selon le chercheur, la finalité projetée par ce projet s’inscrit dans «une optique de valorisation intégrale». En prenant comme exemple l’Europe qui, à son avis, a une longueur d’avance dans la valorisation de produits de la mer, il souhaiterait ultimement que 100 % des résidus de poisson et de fruits de mer soient valorisés. «On s’oriente un peu vers ça. Dans la crevette, il y a une très grande partie qui est valorisée. Mais, dans le crabe et le homard, c’est encore une majorité des volumes débarqués qui se retrouve au compostage, soit en engrais. Ce n’est pas jeté, mais on est loin de la valorisation alimentaire!» Selon Laurent Girault, il y aura néanmoins toujours de la place pour du compostage, notamment par les entreprises qui récupèrent les carapaces de crabe et de homard ainsi que certains résidus qui ne sont pas valorisables.

L’EXEMPLE DE LA CREVETTE

La crevette n’est pas une espèce incluse dans le projet puisque ses résidus sont déjà valorisés. D’ailleurs, le modèle d’affaires établi dans la valorisation des résidus de crevette est une source d’inspiration pour celle des coproduits de crabe et de homard. «Pour la crevette, les deux usines du Grand Gaspé ont déjà développé une approche relativement simple, c’est-à-dire faire une farine avec la totalité de leurs coproduits et elles ont démontré que c’est rentable d’aller dans ce genre de valorisation», soulève le scientifique.

Le consortium ne fait cependant pas la même chose. «On fait un tri des matières premières avant de procéder à leur transformation. […] Si c’est possible avec la crevette, il n’y a aucune raison que ça ne le soit pas avec le homard!» Si le consortium a ciblé le crabe des neiges et le homard, c’est parce que ce sont des espèces qui génèrent de gros volumes de rejets qui sont sous-valorisés.

Si, d’ici quelques années, la pêche au sébaste redémarre au Québec avec des volumes importants, le consortium envisage d’inclure au projet un petit volet pour la valorisation de ce poisson. «C’est une pêche qui va générer beaucoup de coproduits, prévoit Laurent Girault. Donc, on pourrait appliquer les mêmes recettes technologiques avec ces coproduits de sébaste pour des produits différents ou combinés avec le crabe et le homard. Il y a de l’intérêt de certains clients pour des produits qui combineraient du poisson et des crustacés.»

ENTREPRISES CIBLÉES

Onze entreprises ont été identifiées pour participer au projet, dont sept de transformation qui collaborent ou font partie du consortium. Elles sont aussi les sept plus grosses usines de transformation de crabe et de homard au Québec. Quatre sont situées en Gaspésie, deux aux Îles-de-la-Madeleine et une sur la Côte-Nord. Les quatre autres entreprises ciblées sont des acheteurs potentiels des coproduits. Elles sont principalement basées dans des régions urbaines du Québec, dont Montréal et Saint-Hyacinthe.

Le chercheur industriel ne peut, pour l’instant, évaluer le volume potentiel de résidus qui pourraient être valorisés. «C’est une question qui va dépendre de la saison de pêche. Ces dernières années, avec les baleines et les épidémies, l’évaluation normale des stocks a de la variabilité. Mais quand on recule sur 10 à 15 ans, il y a une moyenne quand même assez stable.» Bien qu’il y ait des fluctuations, les sept usines ciblées génèrent une moyenne annuelle de 4 500 à 5 000 tonnes de résidus de crabe des neiges et de homard.

Selon Laurent Girault, la deuxième année du projet sera décisive. Alors que ses partenaires vont travailler sur le développement de produits alimentaires, le consortium amorcera l’étape la plus délicate et potentiellement la plus coûteuse, soit le séchage des coproduits. Si certains clients qui n’ont pas besoin de faire sécher les coproduits économiseront cette étape, d’autres devront développer une stratégie d’entreprise.

Parmi les stratégies envisageables, la construction d’un seul séchoir pour trois ou quatre entreprises représenterait un équipement beaucoup moins coûteux pour chacune. En contrepartie, des usines de transformation de crevette qui se sont équipées chacune d’un séchoir font leurs frais, de l’avis du chercheur. «On va travailler avec les usines à définir les scénarios les plus réfléchis, indique M. Girault. Tout est sur la table.»

E. GAGNON & FILS

Depuis au moins une quinzaine d’années, la majorité des carapaces de crabe des neiges, de crabe commun et de homard de l’entreprise E. Gagnon & Fils de Sainte-Thérèse-de-Gaspé sont destinées à l’agriculture. «On donne ça aux fermiers pour les labours et ça engraisse les terres, mentionne le vice-président. Valoriser, c’est un grand mot! Le homard, quand on a fini avec, il ne reste plus grand-chose. Mais, sur le nombre de livres qu’on fait par année, ça représente quand même beaucoup de tonnes.»

Pour Bill Sheehan, l’épandage constitue la solution à court terme. Il compte sur d’autres projets de valorisation. «On est dans les débuts. On parle des coproduits, aujourd’hui. C’est la tendance. Mais, ça fait une vingtaine d’années qu’on cherche des solutions et, jusqu’à maintenant, il n’y a rien qui crée vraiment de la valeur.»

L’usine de Sainte-Thérèse-de-Gaspé transforme environ une quinzaine de millions de livres de fruits de mer, ce qui donne environ 150 000 tonnes de résidus. Rien ne part vers le dépotoir. Puisqu’il lui en coûterait 100 $ la tonne si ces coproduits étaient envoyés au site d’enfouissement, l’entreprise E. Gagnon & Fils économise un million $ en les donnant à des agriculteurs.

Il faut aussi dire que certaines espèces, comme le homard, produisent peu de résidus parce qu’il est moins transformé. «Sur 5 millions de livres de homard, il y en a peut-être 3 millions qui n’ont aucun résidu parce que c’est du homard vivant, précise le vice-président de l’usine. On a aussi beaucoup de commandes de homard entier, cru et congelé qui s’en vont sur les différents marchés. Donc, c’est un produit qui est utilisé à 100 %.» Il y a tout de même des coproduits issus de l’extraction de la chair des pinces et du corps du homard qui génèrent des résidus. E. Gagnon & Fils transforme aussi, en moyenne, 9 millions de livres de crabe. Comme la transformation du crabe produit de 10 à 15 % de résidus et de liquide, cela totalise quelque 900 000 livres de coproduits.

M. Sheehan estime que la production de résidus de l’usine répond aux besoins des agriculteurs locaux. «Ils n’ont pas besoin d’utiliser des produits chimiques comme engrais. C’est pas mal mieux! Les agriculteurs locaux ont de meilleurs résultats qu’avec les engrais qu’ils utilisaient auparavant.»

Si Bill Sheehan croit aux vertus d’engraissement des terres à partir des résidus de son usine, il se réjouit quand même de la formation du consortium. «Ça ne peut que faire avancer le dossier plus vite! On espère qu’il va se dégager des solutions qui vont être rentables et écologiques.»

Selon lui, une solution innovante dans la valorisation des résidus de biomasses marines trouvera assurément preneur. «C’est un problème ou un manque d’opportunités, croit-il. On se débarrasse de matières qui ont du potentiel. Il y a différentes choses qui se retrouvent dans les carapaces et les résidus de poisson, comme du calcium et des protéines.»

FRUITS DE MER MADELEINE

Les principaux coproduits de Fruits de mer Madeleine de l’Étang-du-Nord sont issus du crabe des neiges et un peu du homard. Pour le moment, un très faible pourcentage des résidus de l’usine est écoulé sur les marchés. «On a quelques tonnes qui sont mises sur les champs, indique l’adjoint aux opérations de cette entreprise des Îles-de-la-Madeleine, Pascal Harvie. Actuellement, il n’y a pas grand-chose qui est récupéré.»

Puisqu’il s’agit d’un milieu insulaire, la municipalité ne peut plus traiter ses déchets comme elle le faisait auparavant. Par conséquent, M. Harvie fonde beaucoup d’espoir dans les travaux du consortium. Cependant, le frein pour le développement de cette filière est, pour les Îles, la rentabilité liée au transport. Expédier des tonnes de résidus à l’extérieur de l’archipel coûte très cher. «On parle d’acheter une machine en collaboration avec d’autres entreprises qui vaut un million $, mentionne-t-il. L’environnement, on est tous pour ça et on veut faire le mieux possible. Mais, comme de raison, il faut que ce soit rentable! C’est pour ça qu’on veut que la municipalité, Merinov, le gouvernement et d’autres embarquent.»

LELIÈVRE, LELIÈVRE ET LEMOIGNAN

Chez Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, le homard génère environ 200 000 livres de résidus. Comme l’entreprise vend beaucoup de corps et de queues de homard avec la carapace, les coproduits représentent 7 à 8 % de la production totale. «Il reste les pinces qu’on décortique», précise le propriétaire, Roch Lelièvre.

L’entreprise de Sainte-Thérèse-de-Gaspé réussit à écouler environ 25 % de ses résidus sur les marchés, surtout pour l’épandage, dans un rayon de 5 à 10 km. «On appelle ça la revitalisation des terres, précise M. Lelièvre. C’est intéressant parce que les terres qu’on a faites, ça a presque doublé leur volume l’année d’après.»   L’entreprise donne les résidus et les agriculteurs s’occupent de les enfouir.

Selon M. Lelièvre, cette pratique engendre des pertes financières d’une vingtaine de milliers de dollars par année. Or, l’homme d’affaires espère que le consortium pourra développer un moyen rentable d’utiliser les coproduits ou, du moins, de diminuer les coûts pour en disposer de façon écologique.

RECHERCHE ET INNOVATION – pages 17-18 – Volume 33,3 Juin-Juillet-Août 2020

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