Les pertes de revenus sont importantes pour les crabiers de la zone 16 qui ont subi à la fois une baisse de quota de 25 % et une chute des prix en 2020. Les pêcheurs des 51 équipages du secteur et les transformateurs se réjouissent toutefois de l’absence d’éclosion de la Covid-19 dans leurs équipes.
La saison de pêche a bien failli ne pas avoir lieu sur la Côte-Nord, alors que le virus faisait planer une incertitude aussi bien sur les marchés que sur la sécurité des travailleurs du domaine. Bien que la pêche ait pu avoir lieu, le prix au débarquement de 3,70 $ la livre offert à ses pêcheurs a fait mal, déplore le directeur de Pêcheries Shipek de la communauté innue de Ekuanitshit, Guy Vigneault.
«On avait déjà une grosse baisse de quota [de 25 %], mais on a eu aussi de bonnes baisses de prix. Juste à Pêcheries Shipek, on a des pertes de revenus de deux millions $, ce n’est pas à négliger», dit le directeur. Celui-ci affirme qu’au cours des deux dernières années, le prix se situait à 5,50 $ la livre pour le crabe des neiges, mais que cette année, ses pêcheurs ont obtenu 3,70 $. Conscient des contraintes sur les marchés à cause de la Covid-19, celui-ci espère tout de même un ajustement qui sera négocié durant l’année, dans le cadre du plan conjoint.
M. Vigneault est confiant pour l’avenir de la ressource : «Le crabe est au rendez-vous, les quotas se sont pris assez vite. La pêche s’est terminée autour du 20 juin, même si on a perdu les trois premières semaines qui sont habituellement les meilleures. Les deux premières, c’était à cause du retard, et la troisième, à cause de la température.»
Le directeur de l’Office des pêcheurs de crabe des neiges de la zone 16, Jean-René Boucher, affirme, de son côté, que la saison de pêche s’est avérée satisfaisante dans le contexte. Au moment d’écrire ces lignes le 9 juillet, il reste moins de 1 % du quota à capturer pour ses membres, ce qui prouve que la ressource est présente sur les fonds marins.
À l’exception du secteur de Natashquan où la pêche a été un peu plus difficile, l’ensemble des flottes a réussi à capturer ses prises rapidement. «On sait que le crabe, c’est cyclique. Il ne faut pas juste se fier sur ce qu’on capture pour dire si la ressource va bien ou pas, mais les pêcheurs ont vu sur le terrain qu’il y a de la relève pour les années prochaines. On va faire les relevés de fin de saison dans les prochaines semaines pour comparer avec l’année dernière», ajoute-t-il.
Concernant le prix de départ fixé à 3 $ la livre, M. Boucher est confiant de voir une hausse attribuée aux pêcheurs après coup dans le cadre du plan conjoint. «On était conscient que dans l’état des marchés au début de la saison, avec la COVID-19, on ne pourrait pas avoir un prix à la hauteur de nos ambitions, mais on a été bons joueurs pour avoir une saison de pêche», dit-il. Celui-ci ajoute que la publication du Seafood Price Current n’était pas encore affichée au départ de la pêche, mais que les premières publications ont laissé entrevoir des prix beaucoup plus intéressants. «C’est sûr que ce qui a été payé au pêcheurs, entre 3 $ et 3,70 $, va être augmenté», affirme-t-il, en spécifiant qu’il n’y a aucune chance que son regroupement accepte le prix de départ qui n’était clairement pas un prix final, et ce aux yeux de tous les partenaires impliqués. Les discussions avec l’AQIP sur le sujet auront lieu en août.
Du côté de la transformation, le directeur de l’Association québécoise de l’industrie de la pêche (AQIP), Jean-Paul Gagné, se réjouit de l’absence d’éclosion de la Covid-19 dans les usines. «Les opérations se sont bien déroulées. On est satisfaits malgré la baisse de 25 % du TAC en 2020. On s’est entendu rapidement avec les pêcheurs pour un prix d’avance, mais on va finaliser le prix bientôt pour que les deux parties soient satisfaites. On a été surpris des prix qui ont pu être obtenus sur le marchés», dit M. Gagné.
Celui-ci affirme que les acheteurs ont répondu mieux que prévu à l’offre de crabe des neiges. «Je ne vous dis pas qu’on n’aura pas d’inventaires en stock pour un certain temps, mais ça a sorti mieux qu’on pensait. On s’attendait à stocker tout ce qu’on allait transformer. Mais le marché local a été excellent. Ça a sorti comme jamais dans les poissonneries. Il y avait des files d’attente, c’était spectaculaire. Et quand on a commencé à vendre sur les marchés extérieurs, ça s’est bien passé. »
L’absence de travailleurs étrangers sur la Côte-Nord a ralenti certaines opérations, mais M. Gagné affirme que les transformateurs se sont adaptés rapidement à la situation. Somme toute, Jean-Paul Gagné affirme que la saison 2020 a été correcte dans les circonstances.
LA CÔTE-NORD – page 12 – Volume 33,3 Juin-Juillet-Août 2020