mercredi, avril 24, 2024
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Chasse plus intensive au phoque gris : un ministère dépendant de l’opinion publique européenne?

Les décideurs du ministère fédéral des Pêches et des Océans savent depuis maintenant au moins six ans que le phoque gris constitue un obstacle majeur pour la reprise du stock de morue dans le sud du golfe Saint-Laurent. Ce sont les scientifiques mêmes du ministère qui l’ont dit clairement. Certains d’entre eux le suggéraient bien avant.
Pourtant, ces six années n’ont pas débouché sur une seule action significative ou même symbolique des divers ministres des Pêches et des Océans s’étant succédé depuis 2011. L’actuel ministre Dominic LeBlanc, venu en relève à Hunter Tootoo il y a un an, ne semble pas pressé d’accélérer le pas.
Il a tout au plus signifié ce printemps qu’il faut trouver des marchés pour la viande de phoque gris s’il est pour donner le feu vert à une chasse plus intensive.
Toutefois, dans un contexte où il vient de débloquer 325 millions $ pour le développement des pêches et de nouveaux marchés pour des entreprises basées dans les provinces atlantiques, le ministre LeBlanc montre une fois de plus que les préoccupations des gens de ces provinces passent bien avant celles du Québec.
Les chasseurs de phoque des Îles-de-la-Madeleine suggèrent depuis des années l’implantation de campagnes de sensibilisation visant à contrer la désinformation émanant des pays européens en ce qui a trait au prélèvement de ces mammifères marins.
Les organismes représentant les chasseurs réclament aussi l’instauration de projets pilotes afin d’ouvrir d’autres marchés susceptibles d’adopter la viande de phoque comme denrée courante. Faut-il rappeler que les propriétés de cette chair sont prouvées et que la viande est un produit en croissance sur plusieurs marchés mondiaux?
La réalité touchant la morue est loin d’être rassurante et elle découle en grande partie maintenant d’une population de phoques en croissance débridée.
Il y avait 7 000 phoques gris en eaux canadiennes dans les années 1960. Il y en avait 505 000 lors de l’évaluation de 2014! Chacun de ces spécimens adultes consomme près de deux tonnes de produits marins, surtout de la morue, par année.
Le nombre de phoques du Groenland est passé d’un peu moins d’un million il y a 50 ans à 7,4 millions d’individus il y a trois ans, dans ce cas sur une surface plus grande, soit l’Atlantique nord-ouest.
L’équilibre naturel est donc rompu dans le golfe Saint-Laurent et dans notre portion de l’océan Atlantique depuis quelques décennies.
Il convient de dire «équilibre naturel» parce qu’avant les interventions pro-mammifères marins de Brigitte Bardot, au milieu des années 1970, la morue, les phoques et les êtres humains vivaient une situation assez balancée depuis quelques siècles, avec quelques crises bien sûr, mais rien de comparable au marasme du poisson de fond tel qu’il est vécu depuis 1990.
Les études sur la question ont prouvé que d’autres facteurs ont contribué à cette disette, en plus des phoques. La surpêche y a aussi joué un rôle déterminant, de même qu’une succession d’hivers froids, de la fin des années 1980 jusqu’au milieu des années 1990. Le stock de morue a baissé à un point où des inquiétudes sur son éventuel rétablissement ont été exprimées par de nombreux biologistes.
Toutefois, le rétablissement lent, mais assez régulier du stock de morue du nord du golfe Saint-Laurent tend à prouver que les mesures de protection des 25 dernières années ont contribué à ce regain. Cette portion du golfe est en outre fort moins fréquentée par les phoques.
Dans le sud du golfe, où le moratoire perdure, les études révèlent que la mortalité naturelle actuelle du stock de morue retranche annuellement à peu près autant de poissons qu’à l’époque d’une capture commerciale forte, comme en 1987 et 1988, juxtaposée au taux de mortalité naturelle du temps.
La prédation des morues adultes, c’est-à-dire celles de plus de cinq ans, par des phoques gris expliquerait 50% de leur taux de mortalité. Ce même taux de mortalité naturelle frapperait de 50 à 60% des morues adultes. La mortalité naturelle a augmenté, toutes proportions gardées, d’au moins deux fois depuis 30 ans, malgré l’absence quasi totale de pêche depuis 25 ans.
Des biologistes et des pêcheurs craignent même l’extinction du stock de morue du sud du golfe si on ne change pas des variables de l’équation. Or, la variable sur laquelle il est possible d’avoir une influence à très court terme, c’est de contrôler la population de phoques.
Les pêcheurs de poisson de fond et, par extension, les chasseurs, visent surtout le phoque gris pour deux raisons. C’est la population dont la croissance semble la plus hors contrôle, puisqu’elle a été multipliée par 70 depuis 50 ans, et parce que le phoque gris n’est pratiquement pas chassé. Moins de 3 000 spécimens ont été prélevés au cours des six dernières années, comparativement à près de 370 000 phoques du Groenland pendant le même intervalle.
Lors de récents échanges entre gestionnaires des pêches et divers groupes de pêcheurs de poisson de fond, un administrateur de Pêches et Océans a admis que le gouvernement est sensible à l’opinion publique internationale. On l’avait deviné, mais il serait encore plus pertinent que le ministère soit sensible à l’opinion des groupes qui justifient son existence.
Être «sensible», c’est cesser de tergiverser et de recourir à des réponses vides de sens, comme la nécessité de «trouver de nouveaux marchés» pour le phoque.
Il existe un plan de contrôle du phoque gris depuis 2014 maintenant. La part attendue du gouvernement fédéral se situe à environ 5 millions $, dans un projet de 14 millions $. Comme le dit Gil Thériault, directeur de l’Association des chasseurs de phoques intra-Québec, il est plutôt incompréhensible qu’un gouvernement ayant prévu un déficit de 23 milliards $ en 2017 et qui vient d’allonger 325 millions $ pour les pêcheurs des provinces atlantiques soit incapable de trouver une somme aussi modeste.
Si cette annonce était synchronisée avec un plan de communications déboulonnant les mythes tenaces véhiculés par Brigitte Bardot, Paul McCartney et des groupes qui n’ont souvent d’écologistes que le nom, le plan proposé par le groupe de monsieur Thériault aurait bien des chances de fonctionner.
Le gouvernement de Justin Trudeau avait promis de l’action après son élection en octobre 2015. Plus de 18 mois après ce scrutin, il a une belle occasion de prouver qu’il en est capable. L’équilibre naturel, le vrai, pas celui des groupes animalistes, ne s’en portera que mieux, et on pourra rétablir au passage des activités économiques porteuses de dizaines de millions de dollars par an dans des communautés qui en ont bien besoin.

Réf.: COMMENTAIRE – page 16 – Volume 30,2 – Avril-Mai 2017

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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