samedi, avril 27, 2024
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Cordages à faible résistance à la rupture : Pêches et Océans Canada reporte, à nouveau, cette obligation

Pêches et Océans Canada repousse à nouveau l’obligation de doter les casiers à crabe et à homard de cordages à faible résistance à la rupture. Le bureau du ministère à Ottawa nous informe que la mesure, qui devait initialement être appliquée en 2023 puis a été reportée à 2024, ne sera finalement que facultative la saison prochaine.

«Cette utilisation volontaire sera autorisée dans certaines pêcheries de homard, où les résultats des essais indiquent que cet engin est aussi performant que les engins de pêche conventionnels, nous précise-t-on. Le Ministère reconnaît que les engins de pêche sécuritaires pour les baleines ne sont pas une solution universelle pour les pêches, et il prend le temps nécessaire pour s’assurer que les engins de pêche novateurs destinés à protéger les baleines sont sécuritaires pour les pêcheurs, efficaces pour protéger les baleines, et facilement accessibles aux pêcheurs.»

Le problème, c’est que ces engins de pêche à faible résistance à la rupture, développés pour protéger les baleines noires contre les risques de mortalité liés aux empêtrements, sont dangereux pour les pêcheurs. C’est ce qui ressort très clairement d’un rapport de la firme d’ingénierie CORBO qui supervise depuis cinq ans des essais en mer pour le compte de l’Association des crabiers acadiens (ACA), dans le cadre du projet Crabiers pour les Baleines. Les tests sont menés en fonction de la cible de résistance maximale de 1 700 livres fixée par le MPO en concordance avec les mesures de mitigation dictées par l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).

Le dirigeant de l’entreprise néo-brunswickoise, Philippe Cormier, raconte que près de 20 000 remontées ont notamment été évaluées tout au long de la saison de pêche 2022, avec la participation de 10 crabiers traditionnels de la zone 12 du sud du golfe. Un tensiomètre sur mesure conçu par son équipe a ainsi permis de comparer l’efficience des cordages standards à celle des engins à faible résistance. Il en résulte que dans 41 % des remontées de casier, la tension des lignes était supérieure à 1 700 livres.

«On a évalué 19 525 remontées avec nos tensiomètres et on a dépassé le 1 700 livres 8 000 fois, spécifie-t-il. Aussi, avec les cordages standards, on a eu un taux de dépassement de seulement 18 % de la charge sécuritaire de travail, contre un taux de dépassement de quatre fois supérieur avec les cordages faibles. Ce n’est pas réaliste pour les pêcheurs.»

En fait, tout cordage ne se casse pas nécessairement à chaque fois que l’on dépasse sa charge de travail sécuritaire, mais sa résistance et sa durée de vie s’en trouvent amoindries. Or, en ce qui concerne les cordages à faible maillage conçus pour se briser dès que la tension est supérieure à 1 700 livres, cette usure prématurée survient dans 96 % des manœuvres de halage. «En plus de l’usure prématurée, la friction de la corde faible entre les deux assiettes du hâleur fait qu’elle s’allonge et qu’elle glisse subitement en dehors du hâleur ou bien elle casse, expose M. Cormier. Le danger c’est que ça vienne fouetter le pêcheur au visage.»

USURE PRÉMATURÉE

Selon le dirigeant de la firme CORBO, les cordages traditionnels ont normalement une durée de vie utile de cinq ans, après quoi ils sont trop usés par cette friction du hâleur et leur exposition au soleil et au sel de mer. L’ingénieur attribue leur durabilité au fait qu’ils sont préétirés à chaud au moment de leur fabrication. Et c’est justement l’absence de cette procédure d’étirement à chaud qui cause l’usure prématurée, de cinq fois plus rapide, des engins à faible  résistance.

«Autrement dit, bien que la résistance à la rupture visée soit de 1 700 livres, on constate que la charge de travail sécuritaire d’une corde faible n’est elle-même que de 340 livres, relève-t-il. En comparaison, la corde standard, elle, va casser sous une tension de 10 000 livres. Puis, quand on parle d’une charge de 340 livres c’est, à toutes fins pratiques, l’équivalent de monter un casier vide!»

Par ailleurs, Philippe Cormier nous apprend que ce fameux seuil de 1 700 livres de tension jugé sécuritaire pour les baleines noires menacées d’extinction a été établi en 2015 par une scientifique américaine, Amy R. Knowlton. Elle a procédé à l’examen de 132 échantillons de cordages, dans lesquels 70 baleines empêtrées ont été retrouvées mortes ou blessées au Canada et aux États-Unis, entre 1994 et 2010. Son analyse a démontré qu’aucun de ces cordages n’avaient une résistance inférieure à 1 700 livres. Aussi la chercheure a-t-elle conclu qu’un tel seuil maximal de résistance permettrait de réduire de 72 % le nombre d’empêtrements qui posent une menace pour les baleines noires.

«Sa déduction est basée sur ce qui n’a pas été retrouvé sur les baleines parce que c’est bien difficile de prendre une baleine pour faire des tests pour voir si elle est capable de se désempêtrer, fait remarquer le PDG de CORBO. Et donc, la conclusion de son étude c’est qu’à 1 700 livres et moins, probablement qu’une baleine peut se désempêtrer par elle-même. Mais il n’y a  jamais eu de cordages de moins de 1 700 livres en situation de pêche commerciale dans le golfe du Saint-Laurent, selon les données que nous avons.»

ENCORE DEUX ANS?

Aussi, l’Association des crabiers acadiens demande une reconduction de deux ans du financement du Fonds des pêches de l’Atlantique alloué au projet Pêcheurs pour les baleines, afin de tenter de trouver une solution qui minimise les risques de blessures ou de mortalité par les empêtrements dans les cordages, et qui soit tout à la fois viable et sécuritaire pour les crabiers. L’ACA souhaite également poursuivre le monitorage des activités de pêche commerciale avec les casiers sur demande, autorisés dans les zones fermées en raison de la présence de baleines.

«Ça reste que la technologie des casiers sur demande est encore nouvelle et on veut s’assurer qu’il n’y ait pas de “mess” qui arrive avec ça, fait valoir Philippe Cormier. On offre un support 24 heures sur 24, sept jours par semaine aux pêcheurs qui ont des problèmes techniques. Ils nous appellent et on règle ça à distance. Ça fait qu’on ne peut pas dire que tout va sur des roulettes. Il y a encore des défis, des choses à améliorer.»

Le MPO reconnaît d’ailleurs que les engins dits sécuritaires pour les baleines noires menacées d’extinction doivent aussi l’être pour les pêcheurs. «La sécurité des pêcheurs est une priorité absolue, nous a-t-on écrit en réaction à l’exposé que M. Cormier a présenté lors d’un Symposium sur les résultats des essais d’engins de pêche sécuritaires pour les baleines, organisé plus tôt cet automne. Nous devons nous assurer que ces engins peuvent être utilisés en toute sécurité avant de les rendre obligatoires dans diverses pêches.»

D’autre part, la NOAA a elle-même annoncé en date du 17 novembre dernier le report jusqu’au premier janvier 2026 de l’entrée en vigueur des nouvelles restrictions américaines sur l’importation des poissons et fruits de mer, en lien avec le renforcement du Marine Mammal Protection Act (MMPA) pour mieux protéger les baleines noires. Afin de préserver leur accès aux marchés des États-Unis, tous les pays exportateurs de produits marins doivent démontrer que leurs efforts de gestion des pêches pour éviter les prises accessoires de mammifères marins, y compris les empêtrements de baleines noires, sont comparables aux mesures américaines en place.

«Nous continuerons de travailler en collaboration avec nos homologues américains et avec les partenaires de cogestion canadiens et les intervenants de l’industrie tout au long de ce processus, commente à ce propos le MPO. […] Le Canada est fier de ses régimes de gestion des pêches de calibre mondial, et nous sommes convaincus que nos mesures visant à réduire les prises accessoires de mammifères marins sont d’une efficacité comparable à celles des États-Unis.»

GESTION – page 30 – Volume 37,1 Février-Mars 2024

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Hélène Fauteux
Hélène Fauteux est diplômée en communications et journalisme de l'Université Concordia. Établie aux Îles-de-la-Madeleine depuis 1986, elle a développé une solide expertise en matière de pêche et de mariculture.
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