vendredi, avril 26, 2024
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Les inquiétudes sur la pérennité du stock de hareng se mêlent à un prix record

La pêche au hareng d’août et de septembre dans le sud du golfe Saint-Laurent se traduit par des inquiétudes en 2018, en raison d’une baisse de quota de 30 % et d’un faible nombre de bonnes sorties de capture. Ces deux contraintes ont toutefois été en partie contrebalancées par un prix record de 36 cents la livre.

La baisse de quota, de 12 656 à 8 778 tonnes métriques, a incité plusieurs dizaines de pêcheurs de la Gaspésie et du Nouveau-Brunswick à ne pas prendre la mer pour cette deuxième ronde de hareng de l’année, après la capture du printemps.

Après trois semaines de capture et près de 60 % du quota global pêché, Jeffrey Vautier, de Shigawake, ne comptait que trois bonnes sorties en mer, une à l’île Miscou et une à Pabos lors de la première semaine, puis une à la pointe de Cap-d’Espoir lors de la troisième semaine.

La deuxième semaine était à oublier, selon lui. «Le hareng ne se rassemblait pas pendant les trois premiers soirs. On n’a pas pêché les mercredi et jeudi soirs. Ce n’était pas 100 % des pêcheurs qui étaient d’accord, mais c’était une bonne majorité. J’ai trouvé ça beau à voir. Ça ne donnait rien de pêcher quand le poisson est dispersé comme ça», note M. Vautier.

UNE RESSOURCE PEU CONCENTRÉE

De façon générale, «les bancs de poisson ne sont pas gros cette année. Ils ne se concentrent pas. Je ne sais pas si c’est parce que l’eau est trop chaude (…) Quand c’est trop chaud, il n’y a pas autant d’oxygène dans l’eau. On voit que le poisson est nerveux», ajoute-t-il.

Cette nervosité pourrait bien être attribuable à un prédateur. «On a vu un énorme banc de thons, comme on n’a jamais vu», souligne M. Vautier, qui a débarqué 700 quarts de hareng en 2017, soit        175 000 livres, et qui pourrait en débarquer 550 cette année, soit entre 135 000 et 140 000 livres. Il livre ses prises à l’usine Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, de Sainte-Thérèse-de-Gaspé.

L’un des seuls points positifs de la saison 2018, c’est une nuit et demie de bonnes prises à la pointe de Cap-d’Espoir. «Ça faisait deux ans qu’on n’avait pas pris de poisson là. On dirait, par contre, que le poisson n’était pas mature, pour les oeufs», dit-il.

Le prix de 36 cents la livre représente l’autre point positif de la fin d’été 2018, comparativement à         28 cents en 2018. «C’est à cause de la grosse demande des boucaneries de Cap-Pelé, au Nouveau-Brunswick», note M. Vautier.

Ce prix n’a toutefois pas été suffisant pour empêcher le nombre de pêcheurs de hareng de continuer à décliner en 2018.

«La flottille compte environ 120 pêcheurs cette année. La moyenne était de 300 à 400, pour le Gaspésie et le   Nouveau-Brunswick il y a 10 ans», s’inquiète Jeffrey Vautier.

LE PHOQUE GRIS, UN GROS PRÉDATEUR

Le déclin du hareng est fortement attribuable à la présence croissante de phoques gris dans le sud du golfe Saint-Laurent, dit-il. «C’est le phoque gris basé à l’île de Sable la plupart du temps. Il y en a 720 000. Chaque phoque mange 40 livres de poisson par jour, fois 365 jours. Comptez le total et vous verrez pourquoi des stocks de poisson baissent», demande-t-il.

Le total donne 10,5 milliards de livres de poisson, ou 4,8 millions de tonnes.

«On peut développer un marché pour ça, pour le phoque; Pêches et Océans Canada nous dit qu’on a le droit mais il nous fournit pas les outils. Le mandat du pêcheur, c’est de protéger le stock de poisson. Le mandat du MPO, c’est de protéger l’habitat, mais ils (les gestionnaires) ne le font pas», analyse-t-il.

Jeffrey Vautier trouve pour le moins bizarre que la Canada considère avec autant d’importance les menaces européennes de boycott commercial divers «alors qu’en 2014 et 2015, il y a eu surpopulation de phoques gris en Europe et que des pays en ont éliminé sans que le Canada proteste. L’an passé, 60 % des appâts d’ici venaient d’Europe!».

Les Européens protègent donc leurs sources d’appâts «pendant que le Canada reste immobile sur cette question. J’ai peur que les pêcheurs québécois et du reste de l’Atlantique aient de plus en plus de difficultés à s’approvisionner en appâts. C’est notre capacité à nourrir notre monde qui est en jeu», conclut Jeffrey Vautier.

Steeve Duguay, de Saint-François-de-Pabos, est également inquiet à propos de l’avenir de la pêche au hareng.

«Il y a trop de prédateurs, avec les pêcheurs, le thon, les baleines et les phoques (…) Je commence à être inquiet parce que je vois ça décliner depuis que je pêche. C’est de plus en plus difficile de le prendre», signale M. Duguay, qui compte quatre ans d’expérience comme capitaine, après avoir pêché avec son père pendant huit ans.

Comme dans le cas de Jeffrey Vautier, la diminution du nombre de pêcheurs prenant la peine d’installer leur gréement de capture de hareng témoigne bien de leur inquiétude, note M. Duguay.

«Ça ne marche pas si un capitaine sort pour faire de l’argent mais pour les aides-pêcheurs, c’est bon ; ça étire la période de travail», dit-il.

Steeve Duguay livre ses prises à Poisson Salé Gaspésien, de Grande-Rivière, où l’on offre un prix de 36 cents la livre. «On ne le croyait pas mais on l’a eu».

Ses prises ont atteint 80 000 livres de hareng en 2017. «Je ne force pas. Cette année, je pourrais arriver à égalité avec l’an passé», remarque-t-il.

Sa première semaine de capture s’est concentrée à l’île Miscou, comme pour la plupart des pêcheurs, et le succès a été mitigé. «La raison est simple, on avait de la misère à rassembler le poisson».

Comme Jeffrey Vautier, il a favorisé lors de la deuxième semaine la fermeture de la capture, après trois des cinq nuits de pêche autorisées. «Les deux flottilles ont fermé pour donner la chance au poisson de se rendre sur les frayères».

Steeve Duguay a profité de l’excellente nuit de captures à la pointe de Cap-d’Espoir, «mais c’est revenu à la baisse après. Ce ne sera pas une année record dans le hareng. Le thon est rendu son prédateur principal et il en a une peur bleue».

MOINS DE VOLUME POUR LA TRANSFORMATION

Le secteur de la transformation du hareng doit composer avec des ajustements, en raison de la baisse du quota et du nombre restreint de pêcheurs s’adonnant à cette activité.

Roch Lelièvre, propriétaire de l’usine Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, de Sainte-Thérèse-de-Gaspé, prévoit dépasser un volume de 1 million de livres de hareng cette année, et peut-être atteindre 1,5 million de livres, mais ce sera loin des 2,5 millions de livres de 2017.

«Il y a un peu moins de pêcheurs à chaque année et il y a eu seulement trois bonnes journées de prises. Je ne sais pas si on est d’avance ou en retard avec la pêche mais le hareng est comme pas prêt. Il y a beaucoup de mâles, et beaucoup d’immatures chez les femelles. Je ne suis pas un expert. On va tous avoir nos idées pour expliquer ce qui se passe cette année, mais ce n’est pas une année comme les autres. C’est la première fois que je vois une situation un peu bizarre comme ça», analyse Roch Lelièvre. Il transforme le hareng depuis 1994.

Le prix de 36 cents la livre est justifié par «le marché des fumoirs, pas la rave. Ça va avec le quota. Les fumoirs du Nouveau-Brunswick veulent s’assurer d’approvisionnements suffisants», ajoute-t-il.

La baisse de quota a un impact sur le nombre d’employés dédiés à la transformation du hareng chez Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, nombre étant passé de 125 en 2017 à 90 cette année. La période     de transformation pourrait aussi être écourtée, mais une possible transformation de homard des Maritimes ou du Maine au cours de l’automne pourrait rééquilibrer le calendrier des employés, signale M. Lelièvre.

Le marché de la rave est caractérisé par «une petite augmentation, mais qui n’est pas à comparer avec le prix offert pour le hareng», dit-il.

Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan transforme une bonne partie de son hareng afin qu’il serve d’appât pour la pêche aux crustacés l’an prochain, mais une proportion majoritaire du volume est placée dans une saumure avant d’être transformé aux Fumoirs Gaspé Cured, de Cap-d’Espoir. Ces fumoirs sont exploités conjointement par l’entreprise de M. Lelièvre et Poisson Salé Gaspésien.

«Comme c’est là, c’est inférieur comme volume. Les deux entreprises avaient acheté 6 millions de livres de hareng en 2018. Pour la part allant à nos fumoirs, il est trop tôt pour dire comment la consommation de hareng fumé se fera cette année. Si le prix augmente, la consommation baissera. Les 22 fumoirs de Cap-Pelé vont tenter de se repayer, après avoir offert 36 cents la livre au débarquement. Comment le marché réagira, on ne sait pas», conclut Roch Lelièvre.

Le hareng fumé en Gaspésie et au Nouveau-Brunswick est surtout vendu dans les Antilles, comme en République dominicaine, en Jamaïque et à Trinidad, mais le marché américain, où les ressortissants antillais sont nombreux, constitue aussi un joueur important en matière de consommation.

Au moment d’aller sous presse le 12 septembre, les pêcheurs côtiers avaient capturé plus de 81 % du quota autorisé de 7 778 tonnes métriques de hareng.

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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