L’entreprise Les Fruits de mer de l’Est du Québec est toujours en attente de la décision du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) à sa deuxième demande pour acquérir un permis de transformation de homard pêché au Québec. L’usine de Matane est revenue à la charge cet été après avoir essuyé un refus en mai.
«On a rappliqué avec de nouveaux faits et on a argumenté, précise le président du conseil d’administration, Jean-Pierre Chamberland. On va voir ce que le MAPAQ va nous dire.» Dans sa deuxième demande, l’entreprise a démontré noir sur blanc qu’il existait un surplus d’offres de homard au Québec qu’elle pourrait transformer sans nuire d’aucune façon aux autres transformateurs de ce crustacé «qui en ont plein les bras», selon Jean-Pierre Chamberland.
«Les usines qui transforment le homard du Québec sont à pleine capacité et ne peuvent plus en prendre, continue-t-il. Il y a beaucoup de homard qui n’est pas traité au Québec parce qu’il y en a trop pour les entreprises qui ont des permis de transformation. On pourrait le prendre et faire travailler plus de gens à Matane parce que la crevette ne va pas très fort. C’est important qu’on puisse avoir du homard en grande quantité pour pouvoir faire les jonctions d’une espèce à l’autre et pour pouvoir garder nos travailleurs à Matane.»
C’est le directeur de l’usine qui a monté l’argumentaire de la nouvelle demande. Si Stéphane Garon refuse de dévoiler les détails, il indique néanmoins avoir démontré, chiffres à l’appui provenant du MAPAQ, que dans les dernières années, une bonne partie des prises de homard pêchée au Québec, a été envoyée ailleurs pour être transformée. «Dans les quantités qui ont été envoyées à l’extérieur, si on avait pris 10 % de ça, cela aurait fait rouler notre usine à 100 %!»
DEMANDE ANALYSÉE PAR UN COMITÉ D’INTÉRÊT PUBLIC
Le MAPAQ a fait suivre la demande des Fruits de mer de l’Est du Québec auprès d’un comité d’intérêt public. C’est ce comité, notamment formé de représentants de l’industrie, qui analyse la demande. «Le comité d’intérêt public écoute les commentaires des autres entreprises qui transforment le homard dans l’est de la province et fait ses recommandations au ministre [André Lamontagne], explique Me Chamberland. On sait ensuite si c’est accepté ou non.»
Lors de la première demande, le comité a justifié son refus par le fait «que ça nuirait à la viabilité des autres transformateurs de homard et qu’il n’y aurait pas assez de ressources pour eux», se rappelle le président du conseil d’administration qui réfute vertement ces raisons. Le ministère avait cependant fait savoir que sa décision n’était pas sans appel et qu’il n’était pas exclu que l’entreprise de Matane puisse éventuellement obtenir le permis tant convoité.
USINE À LA FINE POINTE DE LA TECHNOLOGIE
Reconnue pour la transformation de crevette et de crabe des neiges, l’entreprise a investi quelque 4 millions $ pour construire en 90 jours une ligne de transformation de homard qui est opérationnelle depuis mai. «C’est le dernier cri des usines de transformation au Québec, soutient Me Chamberland. Elle est super moderne.»
Pour le moment, l’usine transforme exclusivement le homard pêché dans les Maritimes. Celui-ci lui est expédié par camion. Par conséquent, l’entreprise ne peut s’approvisionner auprès de pêcheurs et de grossistes québécois. «Ça coûte cher d’aller chercher du homard à l’Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse», déplore Jean-Pierre Chamberland. L’usine transforme actuellement 1,5 million de livres de homard par année, mais elle souhaite augmenter sa production à 2,5 millions de livres.
BÂTIMENT POUR SES TRAVAILLEURS ÉTRANGERS
Les travaux de construction d’un bâtiment pour loger les travailleurs étrangers de l’entreprise vont bon train. Situé en face de l’usine, il est construit sur le terrain qui accueillait jadis le Motel Le Beach, qui a été rasé par un incendie en février. «Il faut que ce soit prêt pour la prochaine saison, soit à la fin mars 2024», souligne le président du conseil d’administration.
L’établissement pourra loger 200 travailleurs qui se partageront 71 chambres, deux grandes salles à manger, deux cuisines et trois blocs sanitaires.
LE BAS-SAINT-LAURENT – page 22 – Volume 36,4 Septembre – Octobre – Novembre 2023