samedi, avril 27, 2024
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Pêche au hareng d’automne : une saison complètement à oublier

Les captures de hareng d’automne sont à ce point mauvaises que le nombre de pêcheurs y participant ne cesse de décroître, parce qu’il est très difficile de rentabiliser ces prises et de justifier les efforts pour ramener de si faibles volumes.

Jeffrey Vautier, de Shigawake, parle de sa pire saison de hareng depuis qu’il prend la mer, c’est-à-dire en un peu plus de 35 ans. Comme pour lui donner raison, les gestionnaires de la pêche ont réduit le quota du sud du golfe de 5 000 à 3 000 tonnes métriques rapidement après le coup d’envoi du 20 août.

«J’ai pris plus de hareng en trois jours l’an passé qu’au cours de toute ma saison cette année», résumait-il à la conclusion de sa cinquième semaine de capture.

Jeffrey Vautier a fréquenté les trois lieux traditionnels de capture de hareng au cours de ces cinq semaines, à savoir le banc de Pabos à Chandler, le secteur de Cap-d’Espoir et l’île Miscou.

«J’en ai pris un peu à Chandler et le reste au large de Miscou. Je livre chez Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan. Le prix atteint 48 ou 49 cents, ce qui est bon, mais il n’y a pas de poisson», dit-il.

La rave était bien visible dans le peu de harengs capturés. «Les femelles que nous avons prises pondaient sur le pont du bateau ou dans le filet, mais on en voyait passer à travers les filets», spécifie-t-il.

La pêche au hareng d’automne se fait essentiellement en groupes de quelques bateaux qui encerclent les bancs de poisson.

«Ma réalité s’applique à tout le monde avec qui je parle», spécifie Jeffrey Vautier, qui voit comme par les années passées passablement de phoques près des bateaux.

«Je vois des phoques, des thons et beaucoup de bars rayés. En fait, il y a une grande abondance de ces trois espèces», souligne-t-il.

Qu’arrivera-t-il d’ici la fin de la saison, qui se termine généralement quand le quota est capturé?

«On ne sait pas ce qui va arriver. Quand nous voyons du poisson sur nos sondeuses, on jette nos filets, mais nous n’en prenons pas. On a l’impression d’être rendus à la onzième heure (à un moment décisif). Si nous ne faisons rien, je suis inquiet pour l’avenir de cette pêche. Le hareng fait partie de la chaîne alimentaire. Ce qui nous inquiète, c’est qu’il n’y avait pas eu de capelan au printemps. Une baleine noire s’est approchée du large un peu, mais elle n’est pas restée. Ce sont des signes qu’il y a des failles dans la chaîne alimentaire», analyse Jeffrey Vautier.

«La ministre Diane Lebouthillier doit faire quelque chose, elle et les gens du MPO (ministère des Pêches et des Océans). Ce ne sont pas les pêcheurs qui ont récolté tout le hareng. Nous devons contrôler la population de phoques gris et de bars rayés. Nous devons écouter ce que les scientifiques disent de la situation. À la fin des années 1970, sur la Côte du Pacifique, le hareng a atteint sa maturité, mais à une plus petite taille que d’habitude. Nous devons vérifier si la même chose est en train de se produire ici. Il y a du poisson, on le voit sur les sondeuses, mais on dirait qu’il ne reste pas là, ou qu’il est trop petit pour rester dans les filets. Les agents des pêches ont vérifié la taille de nos mailles cinq fois en dix jours. J’espère qu’ils font la même chose dans les Maritimes», espère-t-il.

Jeffrey Vautier aimerait afficher plus d’optimisme, mais il fait aussi face à la réalité. «Nous devrons peut-être envisager un moratoire sur le hareng, mais si c’est le cas, nous devrons garder un degré minimum de capture pour observer ce qui se passe dans l’océan. Nous devrons discuter davantage cet automne et vérifier s’il manque vraiment de poisson ou si le hareng arrive à maturité en fonction d’une taille plus petite», assure-t-il.

M. Vautier fait remarquer que les faibles prises de hareng de 2023 seront plus souvent transformées en appâts qu’en produits pour la consommation humaine.

«C’est un poisson qui occupe une grande place dans la chaîne alimentaire des humains parce qu’il est abordable. C’est l’une des cinq meilleures sources d’oméga 3, le saumon étant en première position. La prochaine étape en matière de pêches commerciales reviendra à rééquilibrer l’écosystème. Il y a eu beaucoup de thons le long de nos côtes cette année. Ils sont affamés. Un ami qui le pêche me disait que les thons sont moins gras cette année. Il faut commencer à prendre des mesures de contrôle des phoques et des bars rayés. Si nous ne le faisons pas, ce sont toutes les autres pêcheries qui en seront affectées», assure Jeffrey Vautier.

«Avant, 400 bateaux participaient à la pêche au hareng dans le sud du golfe. Maintenant, seulement 75 bateaux amorcent la saison et après cinq semaines, il en reste 30. La seule raison expliquant la présence de 75 bateaux au début de la  saison, c’est que des pêcheurs voulaient prendre leurs appâts pour l’an prochain.  Ils ne pêchaient pas pour la nourriture humaine», affirme-t-il.

Le 21 septembre, M. Vautier s’attendait à voir les pêcheurs de hareng arrêter la capture dans la nuit du 28 au 29 septembre afin d’amorcer leur chasse à l’orignal le 30.

«On ne sait pas si on va revenir (en mer). Ça dépendra de Mère nature. L’an passé, on a pris du maquereau en novembre, quelque chose qu’on n’avait jamais vu avant», conclut-il, en espérant qu’un tel phénomène frappe aussi le hareng.

Du côté de la transformation, Roch Lelièvre, président de l’entreprise Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, avoue se trouver devant une situation inédite, en matière de faibles volumes de hareng livrés à l’usine de Sainte-Thérèse-de-Gaspé.

«On n’a jamais vu ça. On essaie de trouver une réponse, mais c’est difficile. J’ai 18 pêcheurs. Certains dépassent un petit peu la faible moyenne, mais à cause de l’effort de pêche supérieur. Personne n’a fait de gros voyages cette année. Un gros voyage, c’est 20 000 à 22 000 livres et on n’en a pas vu. Cette année, la moyenne des voyages, c’est entre 2 000 et 4 000 livres. On a peut-être vu deux ou trois voyages de 7 000 livres», aborde M. Lelièvre.

Aucun des trois lieux de pêche habituels, Cap-d’Espoir, le banc de Pabos ou l’île Miscou n’a été plus productif que les autres, dit-il.

«Des soirées, on a vu des bateaux aux trois places, sans meilleur résultat. Ils (les pêcheurs) voient des beaux bancs de poisson et il ne vient pas frayer. Ils sont trop  petits ou ils ne viennent pas dans les filets. Je jase un peu avec des personnes d’ailleurs et on me dit qu’il y en aurait un peu à Pictou, en Nouvelle-Écosse, mais au Nouveau-Brunswick et à l’Île-du-Prince- Édouard, ce n’est pas bon. C’est pour ça que le quota de 5 000 tonnes a baissé à 3 000 tonnes assez vite. On a hâte de voir ce qui se passe à Terre-Neuve aussi», ajoute M. Lelièvre.

La situation globale des pêches le préoccupe. «On n’a pas vu de capelan cette année. Les phoques peuvent être une réponse. Il y a beaucoup de bars rayés, mais je croirais plus que les troupeaux de phoques causent des problèmes. Il y a de terribles de troupeaux dans les frayères. On a l’impression que tout peut être une réponse. Il se passe quelque chose en mer. Regardons le turbot, le maquereau, le hareng. Pour le maquereau, c’est peut-être différent. Il y a eu de petits tests en pêche exploratoire et il y a de plus beaux maquereaux cette année», observe-t-il.

Le faible volume de hareng entré à l’usine de Sainte-Thérèse-de-Gaspé a laissé peu de choix à ses gestionnaires.

«On a fait des appâts en majorité, mais j’ai fait un peu de hareng salé, un peu d’œufs de hareng. Le prix est assez semblable à celui de l’an passé. Ça donne 115 $ le quart de 150 livres», explique M. Lelièvre.

Son usine a arrêté la transformation d’œufs de hareng après deux semaines de débarquements en raison des faibles quantités.

«On produit 5 000 livres d’œufs comparativement à 50 000 livres l’an passé. Le hareng salé est vendu sur le marché régional, à Montréal, dans les Maritimes et aux États-Unis. On n’exportera pas en Europe cette année», dit-il, précisant que l’activité aux fumoirs de Cap-d’Espoir sera conséquemment limitée entre l’automne et le printemps.

Pour allonger la période de travail des employés et pour faire fonctionner l’usine, Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan acquiert 100 000 livres de homard par semaine.

«Ça dure neuf semaines, de la mi-août jusqu’au 14 octobre. Le homard vient de l’Île-du-Prince-Édouard en grande partie, et un peu au Nouveau-Brunswick. On emploie présentement 140 personnes à l’usine. Au printemps, on monte jusqu’à 225. On vend les produits congelés sur le marché américain», conclut Roch Lelièvre.

LES PÉLAGIQUES – page 21 – Volume 36,4 Septembre – Octobre – Novembre 2023

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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