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Pêche au crabe des neiges : la hausse des quotas a contrebalancé des prix moins élevés que prévus

Même si l’année 2022 n’a pas été marquée par des records en ce qui concerne les débarquements et les revenus associés au crabe des neiges, les pêcheurs québécois ont tout de même connu l’une des meilleures saisons de l’histoire de cette espèce, en vertu de prises totalisant 13 300 tonnes métriques et, surtout, de revenus globaux de 196,6 millions de dollars.

Ces données surpassent les résultats obtenus par les crabiers en 2021, résultats ayant découlé de prises de 11 200 tonnes métriques et des revenus totaux de 184,8 millions $ (M$). Les résultats de la dernière saison représentent une hausse de 18,75 % pour le volume de prises et de 6,4 % pour les revenus.

Les débarquements de 2022 étaient les meilleurs depuis les 14 500 tonnes métriques de 2019, alors qu’il faut remonter à 2016 pour voir de meilleurs revenus, à 210 M$. Il s’agissait alors des revenus annuels totaux les plus élevés de l’histoire de la pêche au crabe des neiges.

D’une région du Québec maritime à l’autre, les tendances ont différé passablement, précise le chercheur analyste Simon Desrochers, du ministère fédéral des Pêches et des Océans.

«Sur la Côte-Nord, les prises de crabe des neiges ont diminué de 47 % en sept ans», précise-t-il, à propos de captures annuelles qui ont fléchi de 6 875 à 3 633 tonnes métriques entre 2015 et 2022, ce qui représente 3 242 tonnes. La valeur du crabe des neiges reste toutefois primordiale pour la bonne marche des pêches nord-côtières; en 2022, les revenus découlant des prises de ce crustacé ont représenté 71 % des recettes totales des pêcheurs de cette région.

Durant la période, les revenus ont généralement suivi une courbe plus capricieuse mais somme toute bénéfique pour les crabiers nord-côtiers. Malgré les abondantes prises de 2015, les revenus totaux des pêcheurs s’établissaient alors à 38,8 M$, comparativement à 52,6 M$ en 2022, pour un volume total bien inférieur. En 2021, les crabiers nord-côtiers avaient livré à quai des prises valant 61,2 M$. Les résultats de la dernière saison ont donc constitué un fléchissement de 14 %.

Le record nord-côtier a été établi en 2018, soit 75,4 M$. C’est l’excellent prix de 5,33 $ la livre, le double des 2,65 $ de 2015, qui, allié à un bon quota, avait appuyé ce record.

Les années 2015, 2016 et 2018 avaient permis à la Côte-Nord de devancer la Gaspésie en matière de revenus totaux liés au crabe des neiges. Les quatre dernières années n’ont toutefois pas mené à une répétition de ce scénario, et de loin, note Simon Desrochers.

«En Gaspésie, ça a augmenté, les revenus, entre 2015 et 2022», précise-t-il, en comparant les 37,9 M$ de valeur des débarquements il y a sept ans aux 109,5 M$ de cette année. Ces 109,5 M$ suivaient une bonne année 2021, alors que les crabiers gaspésiens avaient rapporté des captures valant 97,3 M$ à quai. Le record annuel régional a été enregistré en 2017, avec 113,4 M$.

En 2017, les pêcheurs livrant leurs prises en Gaspésie avaient débarqué un volume total de 10 457 tonnes métriques, comparativement à 7 464 tonnes cette année. Les captures de 2017 étaient de loin les plus élevées des sept dernières années. Les quotas de crabe sont soumis à d’assez fortes variations d’une année à l’autre, ce qui peut causer d’importantes différences de revenus pour les pêcheurs, sans égard au prix.

Parlant de prix, Simon Desrochers souligne que celui de 2022 a été avantageux pour les crabiers québécois, dont ceux de la Gaspésie.

«Le prix de 2022 a atteint 6,72 $ la livre; c’est plus que la moyenne de 2017 à 2022», dit-il, notant au passage le prix record de 7,49 $ de 2021, prix qui incitait toute l’industrie du crabe des neiges à s’attendre à un autre record cette année. Ces attentes s’appuyaient sur des inventaires non-existants en février et mars.

Les crabiers des Îles-de-la-Madeleine ont aussi connu une bonne saison en 2022, grâce à des revenus records de 34,5 M$, à partir de prises totalisant 2 188 tonnes métriques, comparativement à 26,2 M$ en 2021 découlant de captures de 1 668 tonnes. Ces données représentent des hausses significatives de 31,7 % pour les revenus, et de 31,2 % pour les volumes.

Le précédent record en ce qui a trait aux revenus remontait à 2019, avec 29,8 M$. En 2022, les 2 188 tonnes métriques de crabe des neiges livrées dans les havres madelinots se situaient dans la moyenne des six dernières années.

LES EFFETS DE L’INFLATION

«Les usines ont payé un très bon prix en début de saison, mais à mesure que l’inflation s’installait, les gens trouvaient que c’était des choses faciles à cibler pour couper dans les dépenses. C’est paradoxal, mais l’inflation a fait une pression à la baisse sur les prix du crabe. Le homard a subi la même pression», analyse Ali Magassouba, économiste au ministère fédéral des Pêches et des Océans.

En plus des attentes un peu trop élevées de l’industrie du crabe des neiges, qu’il s’agisse des transformateurs ou des pêcheurs, l’entrée sur le marché nord-américain de quantités massives de crabe russe jusqu’à la fin de juin a aussi constitué un facteur poussant les prix du crabe des neiges à la baisse. Cet élément a été clairement identifié par les transformateurs. Le boycott des produits russes n’a pas eu d’emprise sur les achats de crabe des neiges puisque ces ententes étaient antérieures à l’envahissement de l’Ukraine.

Les attentes de l’industrie ont propulsé le prix de départ à 8,25 $ et 8,75 $ la livre dans le sud du golfe Saint-Laurent lors du début de saison, le 14 avril; le prix le plus élevé étant versé aux crabiers propriétaires de bateaux munis d’une cale à eau. Neuf jours plus tard, le prix baissait d’un dollar la livre, le premier fléchissement d’une série ayant finalement ramené le prix moyen à 6,72 $.

Ces baisses de prix ont fortement contrasté avec la tendance lourde des dernières décennies dans le crabe des neiges, alors que le prix du début de saison a constitué un seuil plancher prudent, qui ne pouvait qu’être augmenté en fin de saison, au moyen d’une ristourne. L’importance de cette ristourne a diminué significativement au cours des dernières années.

ÉCONOMIE – page 10 – Volume 35,5 – Décembre 2022 – Janvier 2023

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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