jeudi, décembre 12, 2024
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Pêche au hareng d’automne : une saison longue en dépit d’un quota modeste

La pêche au hareng d’automne s’est déroulée lentement en Gaspésie, malgré un quota modeste de 6 294 tonnes métriques, seulement 218 tonnes de plus qu’en 2020 pour le sud du golfe Saint-Laurent. L’absence de hareng au cours de la troisième semaine de capture a nui au déroulement de la saison, tant et si bien qu’à l’aube de la quatrième semaine, la proportion de quota capturé n’atteignait que 68 %.

La saison avait duré moins de trois semaines en 2021 et la plupart des pêcheurs n’avaient pris la mer qu’une dizaine de fois pendant ces trois semaines afin de prendre le quota.

«C’est plus lent cette année, pour plusieurs raisons. Il y a moins de bateaux que d’habitude. Il y en avait 120 l’an passé (de la Gaspésie, des Îles-de-la-Madeleine et surtout du Nouveau-Brunswick) et il y en a 80 cette année. Nous avons amorcé la pêche une semaine plus tard que l’an passé, le 29 août, et après deux jours de capture, les pêcheurs du Nouveau-Brunswick ont fait la grève à cause de la baisse du prix. Plusieurs pêcheurs ont perdu deux jours-là. Puis, pendant la troisième semaine, nous n’avons pas ramené de poisson. Il n’y a pas eu de prises entre la Gaspésie et Pictou, en Nouvelle-Écosse. C’est Mère nature. Il n’y avait pas de poisson sur les sondeuses. Le hareng a pris une semaine de congé», explique Jeffrey Vautier, de Shigawake.

Livrant ses prises à l’usine de Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, de Sainte-Thérèse-de-Gaspé, Jeffrey Vautier a reçu un prix de 40 cents la livre au cours des deux premiers jours, puis 32 cents depuis le début de septembre. L’an passé, le prix s’était établi à 30 cents la livre au cours de la saison.

Il considère que sa saison 2021 se situe sous la moyenne. «Ça arrive. C’est juste une année comme ça».

LES PHOQUES PRÉSENTS

Jeffrey Vautier a vu de nombreux phoques pendant ses sorties en mer. «Un soir, il y en avait tellement dans le secteur de Pabos que les pêcheurs de thon se sont dirigés vers l’île Miscou pour s’éloigner. Les espèces pélagiques montrent beaucoup de résistance, mais il y a quand même des limites. Le stock a beaucoup baissé au cours des dernières années. Je ne sais pas quand le gouvernement (fédéral) décidera de rétablir l’équilibre entre la population de phoques et les espèces comme le hareng et le maquereau mais je crois que ce sera très difficile de revenir à un équilibre», note-t-il.

«Le gouvernement a fermé la pêche à la morue après toutes ces années (28 ans) et le stock n’est pas rétabli. Nous ne voulons pas nous débarrasser de tous les phoques. Nous voulons en capturer un certain nombre et faire quelque chose avec. Il existe des marchés pour ça et nous le savons. Nous devons prélever des phoques. Quand nous sommes sur le point de le faire, le gouvernement nous en empêche. Peut-être qu’un jour, le gouvernement entendra raison sur cet enjeu. On dirait qu’il y a plein d’autres enjeux plus importants. Le sirop d’érable rapporte plus au pays que les poissons pélagiques. Le sirop passe donc devant notre enjeu. C’est pourquoi nous n’arrivons pas à attirer d’attention sur le phoque. Nous vendions beaucoup de hareng pour nourrir des gens dans des pays moins riches que le nôtre et maintenant, nous utilisons la majorité de ce poisson pour servir d’appât. C’est un peu particulier», analyse Jeffrey Vautier.

Alors que la capture est plus lente pour les pêcheurs, l’usine de Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan a pris livraison d’un volume de capture supérieur à l’an passé, en un peu plus de temps il est vrai, mais le président de l’entreprise, Roch Lelièvre, attribue ces bons résultats au dynamisme des 18 pêcheurs qui débarquent leurs prises à son usine. Il a parlé à Pêche Impact le 20 septembre, alors que 68 % d’un quota presque égal à celui de 2020 était capturé.

«On a perdu une semaine de capture parce qu’il n’a pas fait beau et (parce que) le hareng n’était pas là. Il est rentré à l’usine 1,8 million de livres alors que la saison n’est pas finie. On avait reçu 1,5 million de livres durant toute la saison 2020. J’ai plus que l’an passé avec encore des prises à rentrer. J’ai le même nombre de pêcheurs, 18, que l’an passé. Ça va bien. J’ai des jeunes qui sont plus agressifs, 10 ou 11 de la Gaspésie et 7 ou 8 du Nouveau-Brunswick», précise M. Lelièvre.

Le prix de départ offert aux pêcheurs, 40 cents la livre, n’a pas tenu la route.

«Ce n’était pas le prix réel. On pensait que les fumoirs pouvaient payer plus cher. On s’aligne sur le prix de Cap Pelé, où sont situés les plus gros fumoirs au Nouveau-Brunswick. On n’a plus les volumes qu’on avait en raison de la baisse du quota. Ça a été difficile au cours des dernières années pour les fumoirs, et il y a moins de marge de manœuvre pour payer un prix élevé», précise M. Lelièvre.

DIVERSIFICATION DE LA PRODUCTION

Le 20 septembre, il n’excluait pas que le volume de hareng passant par l’usine dépasse les 2,5 millions de livres, ce qui placerait les Fumoirs Gaspé Cured, de Cap-d’Espoir, dans un contexte favorable pour transformer 1,2 million de livres de hareng.

«Avec le hareng, on fait de la rave (les œufs) avec de 5 à 6 % du volume, de la boëtte dans une proportion de 60 % et le reste, un peu plus de 30 %, s’en va aux   fumoirs», précise Roch Lelièvre.

Son partenaire dans les Fumoirs Gaspé Cured, la firme Poisson Salé Gaspésien, de Grande-Rivière, ne produit plus de rave, mais cette usine enverra une petite partie de son approvisionnement de hareng vers ces fumoirs; suffisamment pour atteindre 1,2 million de livres en comptant le volume important venant de Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan.

L’anémie des prises de la troisième semaine de capture a par ailleurs forcé Roch Lelièvre à stopper la production de rave à son usine.

«On avait 100 travailleurs et on a été obligé d’arrêter la rave. On avait 45 travailleurs étrangers, 44 Mexicains et 1 Italien, et il fallait les occuper. On leur a fait faire de la chair de homard à partir de pinces congelées», note M. Lelièvre.

«Le marché de la rave ressemble à celui de l’an passé. J’ai fait le même volume que l’an passé même en arrêtant plus tôt. Le Japon achète la rave. On n’entend pas parler de la pandémie comme facteur     influençant la rave. C’est le quota qui est le plus grand facteur. La rave vient de l’est du Canada et d’autres pays en Europe. La quantité totale a baissé dans le monde et la consommation a baissé. Les personnes âgées mangent ça, mais ils sont moins à en acheter», explique-t-il.

Quant à la boëtte, elle se vend bien. «C’est un bon marché, parce qu’il y a une rareté», signale M. Lelièvre.

En ce qui a trait au marché du hareng fumé, «lors des deux dernières années, le produit a pris plus de temps à sortir; c’est plus lent. La transformation aux fumoirs commencera à la mi-octobre et ça se poursuivra jusqu’à la fin de janvier. On emploiera de 40 à 50 personnes. Vingt travailleurs étrangers ont demandé de travailler aux fumoirs. Il y aura de la place; la pénurie de main-d’œuvre touche aussi les usines de transformation de produits marins. En fait, il n’y a pas un commerce qui ne manque pas de main-d’œuvre présentement en Gaspésie», conclut Roch Lelièvre.

LES PÉLAGIQUES – page 10 – Volume 34,4 Septembre-Octobre-Novembre 2021

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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